[EVENT lune 1217] - Tonnerre

La nuit était calme, peut-être un peu trop calme. Si on en oubliait l'horrible voix de Patte de Fourmi, jacassant tout un tas de paroles à son propre fils, qui à mesure d'écoute : avait appris à sélectionner les mots importants. Que des " hm ", des " oui " sortaient de la gueule du gris, très peu intéressé par ce que pourrait lui annoncer sa marâtre. Il avait appris avec l'âge : que celle-ci n'était pas aussi irréprochable qu'elle le laisserait penser, et que sa réputation au sein du clan n'était sûrement pas la meilleure. Peut-être que la crise d'adolescence y était pour quelque chose, mais il en avait honte... Et peut-être aurait-il préféré que la lieutenante du clan, sa propre tante, aurait pu être celle qui lui donna la vie.

Finalement, la vétéran noiraude saisit à quel point son rejeton n'écoutait rien. Elle le critiqua même à ce sujet, expliquant ô combien les oreilles s'entretenaient.

Et bien évidemment que ses oreilles étaient propres et fonctionnelles. Assis au milieu du clan, le félin fut sûrement un des premiers à entendre ce bourdonnement sourd, autant que de sentir le sol ronronner sous ses pattes. Cela était étrange, Nuage Gris n'avait jamais vu le camp se secouer de cette façon. Et l'espace de quelques instants, il crut bon que celui-ci allait s'ouvrir sous son être et le laisser chuter dans le néant.
Le poil étonnamment gonflé, il fixa sa génitrice qui allait lui demander s'il avait ressenti la même chose. Ce qui était idiot. Alors il lui intima le silence d'un " Chut ", d'un amabilité acerbe avant que la femelle ne s'exécute avec toute la mauvaise volonté du monde.

Il le fixa alors, ce ciel noir paisible annonçant bien là le calme avant la tempête. Puis un grondement, et un fracas sourd. Hypnotisé l'espace d'un instant par les cieux dont la lumière rouge dansait dangereusement en son sein, il n'entendit que trop tardivement ce « ATTENTION ! » lancé par Patte de Fourmi. Puis une douleur le lança sur la cuisse, comme un feu intarissable qui ne cessait de le consumer sur le pelage. Il feula contre cette douleur avant de n'en découvrir le coupable : une branche enflammée. Et plus particulièrement un incendie. Un incendie qui ravageait le camp et ce en une fraction de seconde. Il ne l'avait pas vu venir, pas autant que l'acte héroïque de sa mère. « Je vais voir par ici ! » avait-elle miaulé dans la hâte, se ruant dans une tanière qu'il n'avait su identifier dans la cohue et par cet environnement familier déformé par les flammes. Une tanière dont le toit s'était effondré à la minute où la chatte s'y était engouffrée. Il aurait voulu y courir, user ses griffes jusqu'au sang pour l'y sortir avec toute la mauvaise humeur dont il pouvait faire preuve. Mais cette vision de certains rescapés en sortir, lui fournit de l'espoir. Beaucoup trop d'espoir. Car jamais il ne reverrait celle qui l'avait mise au monde.


Soudain, un petit miaulement attira son attention. L'appel de Nénuphar Nuageux : la tanière des anciens... Appel du Loup et Feu des Nuages y étaient engouffrés. Malgré la douleur lancinante, le gris suivit la petite femelle qui semblait aux abois, par la sortie qu'elle s'était créée.
Il entra dans cette tanière, ou plutôt cette fournaise. L'air y était irrespirable, la chaleur semblait lui fondre les moustaches et pire encore, les cendres lui brûlaient le museau. « NÉNUPHAR NUAGEUX ! » appela-t-il, le feu lui incapacitant soudainement la gorge. Un toussotement, deux... Il tenta de calmer sa respiration. Il devait retrouver l'apprentie un peu trop fébrile, d'autant qu'ils n'avaient aucune certitude que les deux félins coincés étaient encore en vie. Ils devaient fuir au plus vite.

Et c'est là qu'il la trouva. Aux pattes du rouquin, totalement assoupie. Il darda Feu des Nuages, la copie conforme de celle qu'il appréciait peut-être trop. Alors que ce roux-là... Le voir brûler, sans pour autant le désirer voir mourir, ne lui aurait sûrement fait ni chaud ni froid.
Pour autant, son attention fut retrouvée en la novice qui ne semblait pas bouger d'un iota malgré les coups de patte léger qu'il lui fournissait.  « DEBOUT ! On a pas le temps pour ces conneries ! » cracha-t-il avant de tousser à nouveau. La colère avait pris le pas sur la méthode de survie qui s'y était imposée.

Puis il toisa à nouveau son Némésis. Il y'avait un autre félin apparemment. Vivant ou pas, il ne saurait le dire. Mais il n'avait pas la capacité de tirer deux chats de là, et une apprentie ainsi endormie dans cette atmosphère ne tiendrait pas longtemps. « Je la sors de là. » expliqua-t-il avant de saisir la grise par la peau du coup et la trainer malgré le poids, sur le sol. L'effort était complexe, et l'air irrespirable n'y aidait pas. Il ne comptait plus les fois où il s'étouffait dans sa propre toux.

Le temps lui parut être une éternité, mais il tira la féline jusqu'au camp. Il était essoufflé, et le reste des tanières ne tenaient plus qu'à un fil. Il perdrait bien trop de temps à mettre la chatte à l'abris... Elle devait aider. Au moins pour les chatons coincés dans la pouponnière. « Nénuphar Nuageux..  DEBOUT, rho ! » cracha-t-il de plus belle devant le visage impassible de la novice. C'est là qu'il tenta le tout pour le tout. Une griffe enfoncée dans son arrière train, espérant la voir se réveiller. « ALLER. Les chatons d'Ombre des Chouettes et ceux d'Idylle des Flammes ont besoin de nous. » ... Pour ce qui était de Feu des Nuages et son acolyte, ils étaient bien plus solides que des chatons. Et Nuage Gris ne doutait pas de la force de son rival.

Résumé a écrit:

Ébène rejoint Feuille d'Or et Petite Flamme, et propose de l'eau à l'ancienne en essayant de rassurer le chaton.