Qui à dit que chat perché était un jeu ? || Ft : Vague des Mers

Le museau prêt du sol, le guerrier suivait la trace que lui et son compère avaient débusqué peu auparavant. Hm. Nul doute que le renard avait quitté le territoire de l’Ombre, il y a de ça plusieurs jours même, si on se fiait à l’odeur. Bon. Un souci en moins. Dent de Sabre ne se voyait pas du tout annoncer à Étoile de Jais qu’il allait falloir augmenter la surveillance, non seulement auprès de la pouponnière, mais sur leurs terres. Avec Vague des Mers, un guerrier encore jeune et vigoureux, il avait été missionné pour un tour supplémentaire du marquage des frontières. Lors de leur ronde, les deux mâles avaient flairé deux odeurs étranges, quasiment au même moment. L’une était celle d’un renard, et l’autre, celle d’un étranger. Qu’ils soient de passage, ou au contraire toujours présents et problématiques, les deux pistes méritaient d’être suivies, aussi les félins s’étaient momentanément séparés.

A présent rassuré quand à l’éventuelle présence du prédateur roux, Sabre rebroussait tranquillement la piste lorsqu’il se stoppa, alerté par une odeur beaucoup plus attirante que celle du renard : un écureuil. Il battit l’air de sa queue, tenté à l’idée de mener une petite partie de chasse, mais aussi freiné par ses expériences ultérieures. Dans les cas ou la bête n’avait pas flairé sa présence, tout c’était bien passé. Mais… Si cette dernière prenait la fuite, impossible pour le lourd guerrier de rattraper sa proie. Le genre d’échec qui lui avait valu bien des moqueries au cours de sa vie. Ses instincts de chasseur réveillés, le matou se mit en posture de traque. Plus près… Doucement… Encore un peu… Il pouvait maintenant voir de ses yeux le petit animal à la queue touffue. Il furetait paisiblement, à la recherche de graines à se mettre sous la dent. Au moment jugé propice, le chasseur s’élança, mais à ce même moment, le rongeur se mit à paniquer, galopant et grimpant à l’arbre le plus plus proche. Ni une ni deux, Dent de Sabre escalada l’écorce du chêne, galvanisé par la traque.

Malheureusement pour ce dernier, l’écureuil trouva refuge au sein d’une niche creusée dans l’arbre. Impossible de l’atteindre désormais… Ses oreilles s’aplatirent sous le coup de la frustration, et sa queue se mit à battre les airs. Encore raté. C’est pas mon jour. La mine sombre, du moins un peu plus qu’à l’usuelle, le mâle avisa la distance qui le séparait du sol, et entreprit d’avancer ces pattes avant sur le tronc, dans le but d’amorcer une descente. Son poids transféré vers l’avant, il failli perdre l’équilibre, et éprouvant une froide morsure au niveau du coeur, retrouva illico sa position bien ancrée sur la branche. Sabre souffla du nez. C’est pas vrai. Plissant les yeux, il renouvela inutilement l’expérience, avant de faire face à la réalité : il était incapable de descendre de ce fichu chêne. Le poil hérissé, il ferma les yeux un instant. Son oreille droite s’arqua en direction de bruits de pas, qui appartenaient à Vague des Mers. Sans nouvelle depuis un moment, le guerrier avait dû suivre la piste de son aîné pour s’enquérir de la situation. Soupirant bruyamment, la queue agitée par une nervosité visible, il interpella le félin « Hey, Vague des Mers. Je suis là-haut… Et je suis aussi coincé qu’un lapin cerné par des renards. » Certes, il était pas fier. Pas fier du tout. Il s’était efforcé d’ignorer ce sentiment de honte grandissant en ce rendant à l’évidence : Vague des Mers était le seul à pouvoir l’aider. Heureusement pour le guerrier, son acolyte n’était pas le plus railleur, m’enfin, pour le coup, il aurait été en droit de se moquer...

Lors d'une patrouille en binôme, le vétéran avait flairé un écureuil. Manquant de rapidité, le rongeur avait pris la fuite au dernier moment, entraînant le matou à sa poursuite sur le tronc d'un grand chêne. A présent perché, Dent de Sabre s'était rendu à l'évidence : il était coincé et ne parvenait pas à descendre de lui même. On pourrait dire heureusement, Vague des Mers n'avait pas tardé à le rejoindre. Si le demi sourire qu'il afficha en aperçevant son aîné hérissa l'échine de ce dernier, il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir...

Les yeux ambrés du guerrier s'arrondirent à la proposition très prévenante du félin gris. La première idée qu'il formula arracha un petit frisson à Sabre. C'était quand même très haut... « Si je te tombes dessus, je vais t'écraser comme un chaton ! » lança-t-il d'un ton frustré. Non pas qu'il doutait de la résistance de son camarade, mais faut dire qu'il était plutôt lourd, lui. Enroulant sa queue touffue autour de ses grosses pattes, comme pour se rassurer, il poursuivit finalement, résigné : « Viens me rejoindre si tu peux... »

Cette première étape lui donnerait peut être de l'assurance... L'idée de rester coincé ici, et même tout simplement de retenter de descendre l'aurait presque fait trembler. En attendant Vague des Mers, il avisa rapidement les alentours, inquiet à l'idée de se donner en spectacle à un autre chat du clan. Finalement, Sabre observa la silhouette du jeune félin, à l'aise, se rapprocher de lui en escaladant son perchoir.