[EVENT ; lune 1205] La Guerre des Clans

Spoiler:

Brume Argentée courrait de toute ses forces, jusqu'à en perdre le souffle, ses pas frôlaient à peine le sol, tel une flèche d'argent qui se faufilait entre les arbres, dans des terres inconnues, parfois elle manquait de s'emmêlait les pattes dans le sol terreux, parfois de glisser sur les feuilles mortes, en se prenant des fougères et des ronces sur le museau. Ses yeux vairons brillaient d'une étincelle sauvage, elle devait faire vite, ses camarades étaient en danger.

Quelques minutes plus tôt.

La chatte argentée s'aventurait avec prudence sur les terres qui surplombait la rivière et se rapprocher dangereusement du Clan de l'Ombre, plus ils avançaient, plus le doux grondement de la rivière s'atténuait. La guerrière détestait ce sentiment de se sentir étrangère sur un territoire qui lui était inconnu. Sa mère qui était devant avec le reste de la patrouille paraissait plus sereine, pour une fois, malgré son orgueil, Brume Argentée enviait sa mère, elle qui d'habitude aimait s'aventurer sur des terres autres, ce jour-ci, elle avait un mauvais pressentiment, avec tout les événements précédents, une guerre allait bientôt éclater, elle le sentait, des frissons lui grimpaient de ses coussinets jusqu'à la pointe de ses oreilles. Elle ne parvenait plus à remettre sa fourrure en place tant elle était sur le qui-vive. Alors qu'ils progressaient toujours plus loin, un feulement rauque se fit entendre. C'est là que tout commença.

Maintenant.

Lorsque sa mère, qui avait était au corp à corp avec un guerrier plus gros qu'elle, Brume Argentée était restée paralyser, jusqu'à ce que le cris de douleur de la reine blanche qui se prenait un coup de griffes dans les flancs, l'avait réveillée, "va chercher de l'aide Brume Argentée ! Dépêche toi, on a besoin de ren-" elle n'avait même pas eu le temps de finir sa phrase que l'autre guerrier avait bondit sur Flocon de Neige et les deux guerriers roulèrent en boules dans une tornade de griffes, de poils et de sang.

C'était à ce moment précis que Brume Argentée s'était mise à courir à pleine vitesse, comme ci une troupe de renards enragés la poursuivait, elle avait beau avoir des rapports compliquée avec sa mère, elle ne supporterait pas de la perdre, elle avait confiance en la reine blanche, s'était une bonne guerrière, même si elle était toute menue, ses griffes et ses crocs n'en étaient pas moins acérées.

La reine d'argent eu un soupir de soulagement lorsqu'elle atteignit enfin l'entrée du camp, elle n'en pouvait plus et avait l'impression que ses poumons allaient exploser. Elle se jeta de tout son corps au centre du camp, dérapa dans la poussière, son regard pressant, elle chercha la cheffe rousse du Clan de la Rivière, et lorsqu'elle la vit près de la combe, elle s'empressa de la rejoindre, entre deux respirations saccadées, elle réussit à lâcher ;

"- Mélodie des Etoiles ! Vi-vite.. elle expirait bruyamment.. Une attaque- le- clan- de l'ombre.."

Elle tenta de se calmer et reprit avec violence, non envers sa cheffe mais envers ses chats sans âmes qui avaient oser attaquer ses camarades de Clans ;

"- SUIVEZ MOI ! "

Elle attendit l'ordre de la meneuse, impatiente, elle avait beau avoir couru de toute ses forces, des fourmis lui piquaient dans les pattes tant elle avait envie d'y retourner, ses camarades, sa mère, ils avaient besoin d'aide, et vite !

La journée n’avait pourtant pas commencé différemment de toutes les autres. C’était une matinée froide et immobile, une matinée qui annonçait encore bien d’autres matins similaires durant lesquels la neige tomberait et la nature s’endormirait doucement. Ce que la reine rousse ne savait pas encore, c’est que cette matinée blanche et douce, c’était aussi le calme avant la tempête, la douceur avant la violence, la paix avant la guerre.

Elle était en train de déposer le butin de sa pêche matinale sur le tas de ravitaillement sur l’îlot central du camp. Elle est lasse et fatiguée. Dans sa tête, les inquiétudes à présent quotidiennes qui l’emprisonnent depuis ces dernières lunes se sont faites murmure incessant. Le clan a besoin de se nourrir, mais aussi de veiller au bon apprentissage du combat pour les apprentis… Les guerriers n’ont guère le temps de leur inculquer à tous à la fois pêche, chasse et de quoi survivre… Elle secoue la tête, se sentant lourde et pataude, pataugeant dans ces problèmes auxquels elle ne parvient à trouver de solution. C’est à cet instant que le calme se rompt, déchiré par l’arrivée tonitruante de Brume Argentée. Dans sa voix, l’urgence et dans ses yeux la colère. D’instinct, les oreilles de Mélodie des Étoiles s’aplatissent sur son crâne. Comme tous, elle sait déjà ce qui va suivre. Elle croise les regards des guerriers présents sur les îles, un appel au rassemblement. D’une voix pressée, elle distribue les indications qu’elle a déjà répétées dans sa tête à nombreuse fois, en espérant ne jamais avoir à les prononcer. Elle demande au chat du clan le plus rapide à la course de traverser les terres pour prévenir le Vent, leurs alliés, puis se retourne vers tous. Elle aimerait leur dire à chacun combien ils sont importants, de ne pas se mettre en danger, elle aimerait encore avoir du temps… Mais déjà les mots meurent dans sa gorge, car tout cela serait bien hypocrite et vain sur le champ de bataille. Ils le savent tous, et aucun grand discours ne leur évitera l’expérience qu’ils vont en faire. Alors elle se résolut.

« L’heure est donc venue… Allons-y, guide-nous Brume Argentée ! »

Dans la tanière des guerriers, une masse claire s’est éveillée en sursaut, à peine assez tôt pour entendre les paroles essoufflées de Brume Argentée. Le clan de l’ombre… ? Une attaque ? Il revoit, au petit jour, s’éloigner Songe de Fierté à ses côtés pour la patrouille. Il aurait préféré l’accompagner, mais Éclat de Rire avait bien autre chose en tête que de satisfaire les amitiés en confectionnant les patrouilles, et lui-même qui venait de rentrer d’une patrouille de chasse nocturne était allé s’endormir tandis que son tendre courait sans le savoir vers le danger.

« Non ! »

Son sang ne fait qu’un tour, et il jaillit de la tanière sans même s’arrêter pour entendre les paroles de la meneuse. Il talonne Brume Argentée tandis qu’elles les ramènent vers le lieu du drame. Royaume Illusoire ne pense à cet instant pas à la guerre, au sang qu’il devra faire couler. Ses griffes ne sont pas sorties, aucun feulement ne s’échappe de sa gorge. Il ne pense qu’à retrouver Songe de Fierté dans la tourmente et à l’épauler. Tandis que les clans sont prêts à en découdre et à chacun prendre leur revanche, lui ne court que par amour.

ASPHODÈLE DES CHAMPS

Occupée à vérifier en compagnie de deux apprentis que Rose Délicate avait assez de remède pour affronter la mauvaise saison, Asphodèle des Champs n’entendit pas tout de suite les murmures de surprise, les gémissements de peur et la tension qui s’installèrent dans le camp en l’espace de quelques secondes. Un cri attira son attention. Sans attendre, elle s’élança au dehors de la tanière de la guérisseuse et fut surprise de voir un jeune guerrier du clan de la Rivière entourée de guerriers de son clan. Ils la fixaient tous.

« Asphodèle des Champs ! Le Clan de l'Ombre nous attaque ! S'il vous plaît, aidez-nous ! »

La maîtresse de la parole ne put s’empêcher de laisser la stupeur s’échapper d’elle comme un sursaut. C’était donc ainsi que débuterait la guerre. Les tensions entre les clans étaient électriques depuis plusieurs lunes et chaque pas de côté était dangereux. Un rien attisait la colère et les menaces. Un jour ou l’autre, l’orage devait bien éclater et tous les félins de Valeemar le savaient de toute façon. Prise d’une vague d’adrénaline, Asphodèle des Champs se tourna vers les guerriers de son Clan qui la regardaient déjà tous, elle et les membres du Conseil, attendant les ordres. Pin Sylvestre s’exclama : « Allons soutenir nos camarades alliés ! ».  Asphodèle se grandit et sa voix s’éleva sur tout le camp.

« Il est temps pour le Clan du Vent de venir en aide à nos alliés ! La Guerre commence. Battez-vous avez gloire et fierté tout en n’oubliant jamais nos valeurs. Le Conseil veut envoyer un nombre raisonnable de chats au combat afin d’avoir toujours quelqu’un pour veillez sur les plus jeunes et les plus anciens et pouvoir défendre le camp en cas d’attaque imprévue. Selon l’étendue des dégâts une fois sur place, nous appellerons du renfort si nécessaire. »

Asphodèle savait que la majorité des guerriers voulaient être de la partie, mais c’était son rôle en tant que membre du Conseil de veiller aussi à ne pas épuiser son clan dès le début de la guerre. Elle devait rester prudente et prévoyante et espérait qu’on la comprendrait. Inutile d’envoyer plus de chats que nécessaire. Elle n’avait aucune idée de ce qui les attendaient là-bas mais une fois le groupe de combattants réunis, elle fit un signe de tête à Éclat de Péridot qui s’élança à toute allure en dehors du camp pour guider ses alliés vers le champ de bataille.

En arrivant sur place, une foule de chats lançait griffes et crocs, des touffes de poils volaient et les feulements de différents clans se faisaient entendre. Asphodèle ne put s’empêcher de remarquer que la bataille avait lieu sur le territoire de l’Ombre. Était-ce la Rivière qui avait attaqué en premier ? Cela ne changeait pas le fait que leurs alliés étaient en danger et que le Vent devait aider, mais la féline tricolore ne put se retenir de se questionner. Il suffisait de peu pour lancer un combat général, une parole mal placée ou une patte posée un peu trop loin. Asphodèle, mettant toujours un point d’honneur au respect du code du guerrier, poussa un petit soupir silencieux tandis qu’autour d’elle, les félins de son Clan se jetaient dans la mêlée. Mais le temps des questionnements serait plus tard. Pour l’instant, elle devait représenter le Vent au côté de la Rivière et elle ferait son devoir comme promis. Asphodèle des Champs ferma les yeux un instant puis s’élança à son tour en feulant.

Consoude, Thym, Écorne d’Aulne… Comme un mantra, Épine murmure pour elle-même les noms des plantes qu’elle énumère tandis qu’elle les passe en revue, les range en petits tas, et les classe par emploi. Depuis qu’elle est devenue guérisseuse, cette tâche est devenue partie intégrante de sa routine, après son tour quotidien auprès des plus jeunes et plus âgés pour vérifier qu’ils ont tout ce qui convient à leur confort. Elle se permet alors un instant de se laisser submerger par le calme de la petite clairière dans laquelle elle a élu domicile avec son nouveau rôle et de trier les plantes avec un automatisme que seule l’habitude permet. Elle peut ainsi reposer son esprit rapidement fatigué par la vie trépidante du clan, une seconde… Mais pas celle-ci. Au dehors, un cri s’élève, et la voix familière la fait bondir avant même qu’elle ne comprenne le sens des paroles. Elle reconnaîtrait entre mille la voix pleine de terreur de son petit-fils.

Voilà que les plantes volent. Elle s’est levée avant que sa volonté ne se soit manifestée, et la voilà dehors, à se précipiter vers la fratrie. Tout va trop vite, déjà les guerriers s’assemblent, et ils trépignent. Elle tourne autour d’eux telle une mère inquiète, tente de les retenir. Elle aimerait les faire redevenir des chatons turbulents, lisser avec affection leurs pelages ébouriffés par l’attente du combat et les ramener de force dans l’abri bienfaiteur de la pouponnière.

« Vous devriez rester… Votre mère aurait voulu- Non, revenez- »

Mais il est déjà trop tard. Ils se sont éloignés avec la file sombre des combattants, et elle ne peut s’empêcher de remarquer qu’ils ne dénotent ni par leur taille ni par leur carrure parmi les guerriers. Elle est restée prostrée au milieu du camp désert, seuls les murmures de l’absence de la vie du clan restent derrière eux. Ce silence lui donne un électro-choc. Que fait-elle ? Elle n’a pas appris les secrets des plantes pour rester ainsi et compter les victimes à leur retour. Le clan qui l’a accueillie et ses propres petits enfants marchent à présent vers le danger, et elle est restée derrière ? Cette aberration la secoue toute entière jusque dans ses os. Elle file vers son antre, récupérer le paquet soigneusement confectionné jour après jour. Dedans, du cerfeuil, de l’achillée mille-feuille et un beau rouleau de toiles d’araignées. Bien qu’espérant toujours pouvoir en réchapper, Épine se tient très au courant des nouvelles de la vallée, bien sûr qu’elle a anticipé les combats. Elle aussi est prête. Elle se dirige du plus vite qu’elle le peut vers le lieu des combats, suivant tant bien que mal les traces de la file du clan parti peu avant.


Loin de là, Appel du Loup file à travers la forêt. L’alerte a été donnée, un ombreux est venu les trouver. La guerre est là. L’orage qui gronde sous terre depuis des lunes et des lunes s’est levé, et les éléments se déchaînent aux cinq pierres. Lui qui tremblait depuis trop de temps pour pouvoir le compter s’est enfin débarrassé de l’angoisse qui lui collait à la peau, comme l’orage libère le ciel d’été de sa lourdeur maladive. Il court, libre et avide du sang des ennemis, du sang de ceux qui les ont fait trembler et qui osent s’en prendre à leurs proches, de ceux qui se croient plus hauts que les frontières et pactes établis. Ils vont voir. La fureur du Tonnerre va s’abattre sur eux à présent.

Partout dans la clairière, des fourrures entremêlées volent, le sang gicle. Des feulements et cris indistincts se font entendre, des hurlements de douleur et exclamations victorieuses. Enfin. Un rictus né sur le museau du Loup. Il a toujours été un chasseur, l’un des meilleurs. Il n’a plus qu’à se choisir une proie. Devant lui, la maîtresse du Vent file, un feulement hargneux s’échappant de sa gorge. Asphodèle des Champs. Parfait. Il va lui faire regretter d'avoir eu le toupet de mener son clan contre le Tonnerre... Et il n'a pas oublié l'affront que les venteux leur ont fait en s'aventurant sur leurs terres. Il plonge, la déviant de sa trajectoire, et profite de la surprise qu’il a dû lui causer pour tenter de l’immobiliser au sol, tous crocs sortis, prêt à choisir leur cible.

« Fierté… »

L’appel est mort dans sa gorge alors qu’il découvre l’atrocité des combats, la misère et la folie qui s’est emprise des clans. Mais Royaume Illusoire ne peut rester immobile trop longtemps. Il chasse les pensées qui le distraient de son esprit, ferme les yeux un instant et souffle. Il doit le trouver. Il plonge dans la mêlée, sans chercher à se battre, il espère réussir à éviter les adversaires, leur faire comprendre qu’il n’est pas là pour cela… Il cherche seulement désespérément la fourrure si familière de son ami.

La meneuse de la Rivière ne joue pour sa part pas dans le pacifisme. Tous crocs dehors, elle s’est jetée dans la tourmente, elle a tué ses sentiments, elle a la rage aux pattes, et se laisse consumer lentement à coups de griffes et de crocs. Quelque chose en elle crie, car lorsqu’elle s’éteindra, que restera-t-il sinon que des cendres ?

Spoiler:

Tout se bouscula trop vite pour que le lieutenant réalise réellement ce qui était entrain de se passer, il regarda déterminé, les guerriers qui s'élançaient à sa suite, prêt à en découdre plus qu'il n'en faut, lorsqu'ils commencèrent enfin à attendre le tumulte du combat, il accéléra l'allure, des guerriers, dont son fils se jetèrent dans la mêlée sans même réfléchir, il observa la situation, et soudain se retrouva devant une vision d'horreur, son allié et ami, Dent de Sabre était entrain de baigner dans son propre sang, Chant du Lion penché au dessus du vétéran, un sourire satisfait sur son visage.

Le lieutenant roux vit rouge, il bondit sur le jeune guerrier et le frappa de coups de griffés répétitif, il croisa le regard de son fils dans la mêlé et lui ordonna d'un regard de s'occupait du corps presque inerte de Dent de Sabre. Celui-ci qui était en duo, au corps à corps avec une guerrière argentée de la rivière qui n'hésitait pas à en découdre malgré sa petite taille, elle n'en restait pas moins habiles dans ses mouvements et rapide dans ses gestes, Amour laissa son complice de combat s'occupait seul de la jeune guerrière, et il se dépêcha de trouver un guérisseur aux alentours pour lieutenant du Clan de l'Ombre, il repéra Epine Fleurie qui avait déjà commençait à soigner quelques blessés, blessures que le jeune guerrier jugea superficiel au vu de la quantité de sang qui s'échappait du corp du vétéran de l'Ombre.

" - Epine Fleurie ! A l'aide ! C'est Dent de Sabre, je crois que c'est grave. "

Son ton était implorant, il ne tenait pas en place, il désigna de la tête le corps de l'autre, puis rejoignit à nouveau le combat.

BRUME ARGENTEE - FLOCON DE NEIGE

« Brume Argentée, laisse-moi t'aider ! »

Elle reconnut immédiatement la voix du jeune guerrier qui s'élançait vers elle, Eclat du Péridot, elle lui lança un regard entendu, elle était au corps à corps avec deux guerriers du Tonnerre, au même moment où il arriva, l'un d'eux, un brun grand, se dégagea du combat, elle ne s'intéressa pas à ce que celui-ci s'apprêtait à faire. Elle n'avait qu'une idée en tête, se débarrassait de celui-ci pour qu'il lui laisse le champ libre pour retrouver sa mère qu'elle n'avait pas pu trouver dans la mêlée.

« Je t'en supplies Eclat du Péridot, trouve ma mère et aide là, je m'occupe de celui-ci, elle le lorgna mauvaise, je vous rejoins dès que le champ est libre pour moi ! »

La vétérante blanche était au corps à corps avec une jeune guerrière du Tonnerre, malgré son âge avançait, elle ne se démontait pas, elle en avait connu d'autre, et ce n'était pas sa première guerre comparé à d'autre qui giclait dans le sang pour la première fois, alors qu'elle baissa sa garde un moment, l'autre lui assena un puissant coup de griffes en pleine face, et Flocon de Neige recula de trois pas, avant de perdre l'équilibre, elle avait perdu l'avantage et elle était dans une mauvaise situation.

LUNE GIVREE

Lorsque Etoile de Jais avait lancée l'appelle, la guerrier cendrée n'hésita pas un moment, elle se jeta dans la mêlée et se retrouva face à un guerrier du Clan du Vent, elle le reconnaissait pour l'avoir vu plusieurs fois, Renard Polaire, le guerrier était connu pour silence, mais n'en restait pas moins un adversaire dangereux, d'ailleurs il n'hésita pas à lancer l'assaut, surprise, elle roula sur le côté et évita de justesse un coup de griffe à l'oreille gauche, il cracha et hérissa tous ses poils pour se faire paraître plus grande et plus robuste, elle n'avait pas l'intention de le laissait gagner, elle avait encore beaucoup de choses à réaliser dans sa vie, celui-ci, semblait penser la même chose puisqu'il la bouscula immédiatement après qu'elle ai pu reprendre ses appuis. Elle lui assena un coup dans les côtes, et elle vit un rictus de douleur sur le visage de l'autre, elle esquissa un sourire provocateur mais l'autre ne semblait pas avoir dit son dernier mot, dans un bond prodigieux, elle n'eut même pas le temps de réagir, Renard Polaire la plaqua fermement au sol, toutes dents dehors, il allait lui tranchait la gorge, Lune était terrifiée à l'idée de mourir sur le champ, et son instinct fit quelque chose qu'il ne s'y attendait pas. Dans un geste agile, elle délogea ses pattes arrière, et les planta dans le ventre de guerrier, il allait passer à l'acte lorsqu'elle eu une vision de son chaton mort-né, et une rage folle s'empara d'elle, dans un geste brutale et violent et lui ouvrit le ventre, laissant échappa une vague de sang qui gicla sur elle, le matou, surpris, tituba puis s'écroula au sol.

Lune Givrée l'observa, ébranlée, ahuris, hébétée, qu'est-ce qu'elle venait de faire ?
Le guerrier beige et brun se vidait progressivement de son sang tout en hoquetant. Elle le regarda désespérée, elle ne voulait pas le tuer, ça n'avait jamais était son but, elle voulait juste le blesser assez pour qu'il batte en retraite, le guerrier cracha une dernière gorgeait du liquide chaud et rouge, puis sa tête s'abattit lourdement sur le sol, ses yeux devinrent vitreux, et elle comprit, elle avait tuée Renard Polaire.

Elle ne ressent pas l’air d’un froid mordant, sciant, pas plus que son regard ne s’attarde sur les feuilles rougeâtre qui tapissent le sol mousseux, comme autant de tâches de sang. Elle est concentrée, appréhendant son but autant qu’elle tente de l’atteindre le plus vite possible, de la vitesse de la vieillesse qui est devenue la sienne. Elle ne paraît pourtant aucune faible ainsi, qui porte courageusement son fardeau végétal sur les traces des combattants partis plus tôt, avec sa vaillance caractéristique.  

C’est l’odeur qui l’atteint en premier, avant les cris de guerre et de terreur. L’odeur du sang. Elle lui emplit le nez, et tous ses sens, se déversant comme un poison. Puis vient la vision, celle de la fureur guerrière qu’ils dirigent tous les uns contre les autres, des griffes qui déchirent, des crocs qui s’enfoncent dans la chair animale. Epine recule presque, hésite, à l’orée de l’espace de la bataille. Ses poils se sont hérissés sur sa nuque, ses griffes instinctivement se sont révélées. Le courage qu’elle avait précieusement entretenu sur le trajet s’est échappé en une fraction de temps.  Son instinct crie en elle, et elle ressent dans tout son être l’aberration d’être ici présente, et l’urgence de s’éloigner.

Et pourtant, elle reste. Une plainte a retenti non loin d’elle, un chat tombé dans un fourré, qui claudique, l’épaule saignant abondamment. Déjà son adversaire s’est relancé dans la bataille, et lui reste pantelant sur le côté, peinant à se relever. Son devoir s’est rappelé à elle, Epine Fleurie ramasse prestement son fardeau et aide le tonnerreux à se remettre sur ses pattes, puis commence à inspecter la blessure. C’est à cet instant que l’appel retentit.

Elle perd un instant ses moyens devant le jeune chat qui l’interpelle, elle ne le connaît pas et se fait d’abord menaçante, puis les mots prennent sens et elle se précipite vers l’endroit qu’il lui a indiqué, au centre des combats. Elle doit se battre contre elle-même et s’armer de toute sa volonté pour traverser les corps en mouvement, qui viennent en vagues enragées et menacent plus d’une fois de l’emporter. Elle se fait furie et feule contre ceux qui l’approchent d’un peu trop près, faisant bien attention à ce que le paquet qu’elle porte entre ses dents serrées soit en évidence. Elle le sait, si l’un d’entre eux la touche, c’est la fin pour elle. Mais l’enjeu qui se joue est bien plus important.

Elle suffoque presque en découvrant le corps inerte du lieutenant de l’Ombre, masse sombre gisant dans une tâche plus sombre encore. Le sang, peu à peu absorbé par le sol, macule tout d’un rouge foncé et visqueux déjà. Elle sent un vent de panique souffler sur elle, la submerger presque.

« Dent de Sabre ! J’ai besoin que tu reste avec moi, je t’en prie. »

Elle hurle pour couvrir les combats, pour essayer de se faire entendre du déchu. Puis la panique se substitue à un étrange sang froid face à l’absence de réaction, à l’immobilité bornée que lui impose le vétéran. Elle serre les dents, cherche autour d’elle un court instant.

« Eh là toi. Viens par ici, mets toi là et appuie bien fort avec tes pattes comme ça. Reste surtout ainsi, ne bouge pas d’une oreille compris ? »

L’apprenti qu’elle a hélé, jeune âme perdue dans la tempête, est resté un instant hésitant, mais son ton sans appel et la mare de sang ont sûrement fait qu’il a fini par se décider. Epine n’a aucune idée de quelle est son clan, mais elle a bien d’autres chats a fouetter. A présent que le sang s’écoule moins, elle peut prendre le temps de vérifier la respiration du grand chat. Une vague de soulagement s’abat sur elle lorsqu’un souffle, faible mais bien présent vient faire vibrer les moustaches qu’elle avait penché sur lui. Elle soupire.

« Il n’est pas question de le bouger pour l’instant… Je vais bander ça. Continue bien à appuyer sur la plaie surtout. Et merci pour ton aide, jeune chat.»

Spoiler:

Fierté. Fierté. Le nom tourne dans sa tête comme un mantra, une obsession qui bientôt compose le monde. Il évite un guerrier. Fierté. En écarte un autre de son chemin. Fierté. Il ne voit plus le sang, il n’entend plus les cris. Fierté.

Il n’a pas eu le temps de voir la combattante arriver. Elle s’est jetée sur lui sans crier gare, toutes griffes dehors, et il sent les lacérations dans sa chair avant de réellement la voir, avant que son regard ne rencontre ses yeux verts et jaunes. Et, pour la première fois, la haine s’éprend de son cœur. Elle n’a pas le droit. Elle n’a pas le droit de se mettre en travers de son chemin ainsi, de mettre en péril son monde. Il n’est pas là pour ça, il ne veut rien lui faire, il cherche simplement quelqu’un, et elle est une perte de temps. Elle n’est personne. Un grognement s’échappe de sa gorge, puis des feulements lorsqu’il perd son équilibre sous le choc de la percussion et se retrouve coincé à sa merci, coincé ici alors que Fierté a sûrement besoin d’aide plus loin. Le désespoir prend le dessus sur son sang-froid, alors qu’il frappe à l’aveugle de toutes ses forces, de ses pattes arrières pour tenter de la déloger, et de ses pattes avants visant les yeux, les yeux, la vision si précieuse dont chacun a besoin sur le champs de bataille. La vision que Fierté, il en est intimement convaincu, n’a plus dans son intégralité.

Elle n’a pas encore franchi les frontières de la clairière qui marque le camp, autour du grand arbre lorsqu’elle entend le cri retentir. Les deux souris qu’elle porte dans sa gueule, s’apprêtant à les déposer sur le tas de gibier, lui tombe de la bouche. Elle espérait que ce moment n’arriverait jamais. Elle avait refusé d’y croire. Et aujourd’hui encore, elle refuse de l’entendre, elle espère que Nuage de Fraise se trompe. Mais devant ses yeux écarquillés, une frénésie paniquée s’empare du camp entier, et déjà des guerriers se rassemblent à son centre. Une troupe de guerre. Encore sous le choc, elle n’a pas le temps de réfléchir et se rapproche inconsciemment de toutes ces fourrures familières qui se trouvent dans le groupe. Vaillance Eternelle, qui saute au bas de la plateforme de la pouponnière, l’air grave. Mûre des Bois, qui se tient près de Souvenir des Etoiles, celui en qui elle voit un ami et depuis peu un chef. Elle ne réfléchit pas à sa possibilité de rester, si elle en avait eu le temps elle l’aurait sûrement fait. Mais déjà, l’heure du départ a sonné, et elle est emportée par la cascade de guerriers qui galopent vers les terres voisines.

Alors qu’ils dévalent dans la forêt de bouleaux et que bientôt les arbres clairs laissent place à la ténèbres des hauts pins, elle se retrouve proche d’un pelage gris bleu familier. Lorsque les premiers feulements résonnent non loin, elle s’en rapproche, se retrouvant flanc contre flanc avec la chasseresse qu’elle a souvent admiré. L’odeur de la peur se sent-elle sur sa propre fourrure ? Elle espère que non.

Le spectacle est atroce, et elle reste un instant estomaqué devant tant de violence, devant le sang qui coule jusque dans les fourrés alentours, devant la mort qui s’est emparée des lieux, qui y construit un empire. Une vision d’horreur à laquelle rien n’aurait pu la préparer. A peine a-t-elle fait quelques pas, assommée par le choc qu’un duo de fourrure lui bloque le passage, la faisant sursauter, son pelage immaculé doublant de volume de peur. Un mâle crème aux prises avec une guerrière bicolore, qui a très visiblement le dessus. Tous deux ont la hargne aux yeux, et les pattes prêtes à déchirer, à tuer si rien ne les en empêche.

Clan des Etoiles, aidez-nous à arrêter cette guerre.

Une dernière prière, un regard échangé avec Mûre des Bois à ses côtés. Elles se lancent.

Il a perdu Asphodèle des Champs. Après l’avoir percuté, ils ont tous deux étés propulsés dans un buisson, et elle a ensuite été emportée par la foule virevoltante. Il ne sait même pas s’il a réussi à lui arracher une ou deux touffes de poils. Il en crache de déception, et n'en est que plus affamé de sang. Il l’aura la prochaine fois. En attendant, un peu à l’écart du gros des combats, il peu prendre le temps de se redresser et d’observer la situation. Les premiers corps gisent la clairière. Peu de ses connaissance… Si. Là-bas, il reconnaît Constellation de Lumière, un guerrier de l’Ombre croisé quelques fois lors des Assemblées, dont les dernières onces de vie quittent le corps. Le Loup s’approche, appuie ses pattes sur les paupières du félin, fermant ses yeux qui plus jamais ne verront la lumière, fixant la plaie béante qui déchire sa gorge et son abdomen. Il fera payer ça à ces sales riveux et venteux. Le voilà à la recherche de sa nouvelle cible lorsque ses yeux remarquent des silhouettes approchant du lieu des combat. La Lune ! Ils les prennent par revers ces traîtres ! Mais il ne les laissera pas faire. Il bondit, encore épargné par les combats et avec la rage au ventre il fait un adversaire de choix. Et en première ligne devant lui, il y a Souvenir Irréel, ou devrait-il dire, Souvenir des Etoiles. C’est lui sûrement qui a fait le choix d’emmener le clan au combat, alors qu’Etoile de Nuit avait fait la sage décision de garder la neutralité. Le Loup ne veut pas se battre contre sa propre famille, dont l’illustre cheffe ainsi que d’autres membres de la lune font partie. Il en veut à Souvenir des Etoiles d’apparaître ainsi, et de les mener au combat. Forcément, il ne doit pas avoir peur, du haut de ses neuf vies toutes fraîches. Eh bien, le Loup va s’occuper d’abaisser un peu ce chiffre. Il va lui faire regretter d’avoir emmené la Lune au combat. Toutes griffes et tous crocs dehors, il fond sur le chef, sans chercher à le propulser au loin et à l’entraîner dans un corps à corps, mais simplement en frappant vite et fort, là ou ça fait mal. Juste avant l’impact, le Loup plonge au sol, et vient le chercher à la gorge.

Cœur de Pluie

Cœur de Pluie était de retour au camp pour de bon, après plusieurs voyages pour ramener ses proies. Il était sorti tôt, avant le lever du soleil, pour aller chasser. Il affectionnait tout particulièrement ces sessions de chasse en solitaire, mais il aimait aussi retrouver ses camarades. C’était son grand paradoxe, apprécier la solitude sans être capable de rester trop longtemps seul avec ses pensées. Après avoir déposé sa dernière proie - un mulot maigrichon - il s'installa devant la tanière des guerriers. Il entreprit un brin de toilette puis s’allongea, la tête posée sur ses pattes avant. Le soleil automnale peinait à réchauffer sa fourrure, mais la caresse des rayons lumineux n’en restait pas moins agréable. Cœur de Pluie s’endormit.

L’irruption soudaine de Nuage de Ronces le réveilla en sursaut. Le hurlement du novice au pelage noir fit tressaillir le chasseur. Ainsi, ils y étaient enfin. Alors que les tensions entre les clans étaient plus que palpables, il ne s’agissait plus d’une simple menace. La guerre était déclarée. Ainsi soit-il. Bien que la perspective d’un champ de bataille rougi par les effusions de sang ne l'enchantait pas, l’escadron était évidemment résolu à se battre jusqu’au bout. S’il devait mourir pour son clan, il n’hésiterait pas.

Au signal d’Étoile de Jais, il se redressa et se rua à la suite des guerriers et des novices qui se dirigeaient vers le conflit. Une odeur familière, plus que toutes celles qui l’entouraient déjà, vint lui chatouiller le museau. Hiver Ensoleillé. Le guerrier crème pressa son flanc contre celui de son frère. Ce contact était galvanisant. Quelle joie de courir côte-à-côte ! Depuis combien de temps n’avaient-ils pas été si proches ? Ils n’échangèrent aucun mot, mais leurs regards voulaient tout dire. Le félin gris fut rassuré par cette proximité ; son frère restait son frère. Quel malheur qu’il faille une guerre pour s’en rendre compte …

Ils déboulèrent sur le champ de bataille et se jetèrent corps et âme dans la mêlée. À grands coups de dents et de griffes, attaquant et se défendant, les guerriers de l’Ombre se battaient avec ferveur. Hiver Ensoleillé était au corps à corps avec une femelle du clan du Vent. Alors que Cœur de Pluie s’apprêtait à aller l’aider, il fut percuté par un chat massif et projeté à l’écart des combats. Il roula sur lui-même et banda ses muscles, prêt à bondir à nouveau, lorsqu’un flash roux et blanc attira son regard. Il se retourna, surpris. Un guerrier, hors de la mêlée générale, semblait penché sur quelque chose, quelque chose que Cœur de Pluie ne parvenait pas à distinguer. La curiosité le poussa à s’approcher. Avec horreur, il réalisa que ce quelque chose, ce minuscule quelque chose était un chaton. Un chaton. Mais que faisait-il ici ? Et à quoi jouait ce guerrier ?

Sans plus de réflexion, inondé d’une adrénaline renouvelée, il se jeta sur le rouquin. Ils luttèrent dans un tourbillon de griffes, de crocs et de touffes de poils. Cœur de Pluie sentit son flanc droit se faire lacérer et ne put retenir un cri de douleur. D’un coup de hanche, plus vif que vraiment puissant, il se dégagea de la prise de son adversaire et lui mordit une patte arrière de toute la puissance de sa mâchoire. Le matou se dégagea, les traits déformés par la douleur. Son regard changea, la lueur qui animait ses prunelles se fit plus lucide. Et Cœur de Pluie comprit qu’il avait été aveuglé par sa rage pendant l’assaut. Il n’avait pas dû réaliser qu’il avait choisi un chaton pour cible. L’escadron feula pour marquer la fin du combat, et le guerrier ennemi détala.

Il se retourna, déconcerté et considéra le chaton. Une femelle, chétive et au regard apeurée. Sa fourrure écaille était hérissée. Lentement, Cœur de Pluie s’approcha. Il ne reconnaissait l’odeur d’aucun clan. Oubliant complètement le chaos de la bataille qui se déroulait à seulement quelques pas d’eux, le félin gris réfléchit. Que pouvait bien faire ce chaton ici ? Où était sa mère ? Elle ne devait même pas avoir deux lunes. Il n’avait pas le temps de lui demander d’où elle venait. Et il ne pouvait certainement pas la laisser au milieu de cette guerre. Impulsif, il prit sa décision. Il allait la ramener au camp, et revenir se battre ensuite. Il en aurait peut-être le temps.

Avec toute la douceur dont il était capable, il attrapa la petite par la peau du cou et s’élança. Il fit attention à bien contourner la mêlée pour ne pas mettre en danger son fardeau, mais ne put s’empêcher de s’attarder un moment à côté des combats. Il vit son frère se battre avec bravoure et fut empli de fierté. Il reviendrait se battre à ses côtés une fois la petite en sécurité. Il reconnut d’autres félins, amis comme ennemis, croisés à des assemblées pour la plupart. Il reconnut des chats avec qui il avait travaillé soudé lors de la Marée Noire. Il vit le corps inerte de Constellation de Lumière. Puisse-t-il chasser en paix, auprès de nos ancêtres.

Il eut une pensée pour le pauvre Nuage Libre. Il devait être atterré par la perte de son mentor, s’il s’en était seulement déjà rendu compte. L’escadron connaissait cette douleur. Au moins lui avait-il pu voir la fierté de Neige Éternelle lors de son baptême de guerrier. Le jeune félin ébène n’aurait pas cette chance. Quelle tristesse. Quelle folie était-ce que ce spectacle sanglant. S'apprêtant à courir, il fut stoppé net dans son élan par une vision d’effroi qui l’immobilisa. Entouré d’Épine Fleurie et d’un apprenti, étendu dans une mare de son propre sang ; Dent de Sabre. Non, pas ça. Tout mais pas ça. Que ferait l’Ombre sans son lieutenant ? Que ferait Cœur de Pluie sans son ami ? Le temps lui manquait. Dent de Sabre était entre de bonnes pattes, aucun doute. Cœur de Pluie se mit à courir, aussi vite qu’il le put mais tentant le plus possible d’amortir chaque bond pour éviter trop de secousse à la petite solitaire.

Essoufflé, il arriva au camp de l’Ombre. Il déposa la petite au sol.

« Nous sommes arrivés. Je vais m’occuper de toi ne t’inquiète pas. Mais avant dis-moi, comment tu t’appelles ? »

Il avait parlé d’une voix douce. Il lui passa un petit coup de langue sur le front, espérant que ce geste aiderait à la rassurer. Bien que son envie de retourner se battre le plus vite possible aux côtés de ceux qu’il aimait lui tordait les entrailles, il rechignait à abandonner aussi vite sa petite protégée. Il allait d’abord la conduire à la pouponnière et s’assurer que quelqu’un prendrait soin d’elle.

Cœur de Pluie

Cœur de Pluie attendait la réponse de la petite. Elle ne tremblait plus, et l’expression de terreur qu’elle affichait plus tôt avait disparue, c’était déjà ça. Pressé de retourner auprès de ses camarades pour livrer bataille, il avait hâte de s’assurer qu’elle serait en sécurité au camp au moins pour le reste de la journée. Une des reines était sûrement rester veiller sur la pouponnière. Le guerrier gris balaya le camp du regard. L’idée qu’il aurait dû bourdonner d’activité à cette heure de la journée lui serra le cœur. Combien de ses camarades avaient quitté leur foyer pour de bon, sans savoir qu’ils ne reviendraient pas ? Combien de frères et de sœurs les chats de tous les clans devraient-ils enterrer ? Combien d’amis auraient-ils à pleurer ? Mieux valait ne pas y penser maintenant, ou il ne serait jamais en état de retourner se battre.

Ses yeux se posèrent à nouveau sur la chatonne. Alors qu’il l'encourageait du regard à lui répondre, celle-ci, contre toute attente, se leva et fila vers le tas de mousse le plus proche d’eux. Elle étancha sa soif. Bien sûr. Cœur de Pluie s’en voulut. Dans sa précipitation, il n’avait même pas cherché à savoir si elle avait faim ou soif. Peut-être même était-elle blessée. Il la détailla alors qu’elle lapait la mousse avec le peu d’énergie qu’elle avait. Elle semblait fatiguée, et était bien trop maigre, même pour son âge. Impossible d’estimer réellement son âge d’ailleurs, entre 1 et 2 lunes, tout au plus. Le chasseur n’était pas doué pour ces choses-là, trop souvent désintéressé du réel.

Alors qu’elle avait fini de boire, Cœur de Pluie resta figé de surprise quand il compris ce que sa petite protégée était en train de faire. De ses minuscules crocs, elle attrapa une boule de mousse et revint vers lui en courant, aussi vite que lui permettaient ses petites pattes. Avec empressement, elle appliqua la mousse sur le flanc du guerrier. Il ressentit comme un picotement et jeta un regard. Effectivement, son flanc saignait plutôt abondamment, mais la plaie n’était pas profonde et se refermerait vite, surtout avec les soins de leur guérisseuse. Parfois, Cœur de Pluie se demandait ce que les clans feraient sans leurs guérisseurs. Il reporta son attention sur la chatonne, qui regardait, horrifiée, ses efforts tomber à l’eau. Sa maladresse avait quelque chose d’attendrissant. Il l’imaginait déjà, apprentie guérisseuse, sous les ordres autoritaires mais néanmoins affectueux d’Épine. Cette vision lui procura une drôle de sensation. Il ne savait pas pourquoi il avait pensé à ça. Après tout, il n’était même pas dit qu’Étoile de Jais accepte qu’elle reste, ou qu’une reine accepte de s’occuper d’elle. En fait, il n’était même sûr que la petite elle-même souhaite rester. Quelque part à Valeemar, des parents affolés étaient peut-être à la recherche de leur fille. Avait-il fait le bon choix en l’amenant ici ? Il n’aurait tout de même pas pu la laisser là-bas, livrée à elle-même.

D’un petit coup de museau, il la repoussa doucement.

« Ne t’en fais pas pour ça, notre guérisseuse s’en occupera plus tard. Écoute-moi maintenant. Je dois partir, mais je vais revenir, d’accord ? En attendant, je vais t’amener dans un endroit où l’on s’occupera de toi, où tu seras en sécurité. Je reviendrai le plus vite possible, je te le promets. »

Il n’avait pas de mal à parler étrangement, comme si les mots avaient une volonté propre. Il ne réfléchissait pas indéfiniment avant d’agir. Que de nouveautés aujourd’hui … Il réalisa trop tard que la jeune chatte ne savait probablement pas ce qu'était un guérisseur, mais tant pis, le temps lui manquait.
Il plongea ses yeux dans ceux de la chatonne. Il ignorait toujours son nom, mais si elle n’était pas encline à répondre tout de suite, cela pouvait attendre. Décidément, il rechignait à la laisser, mais le devoir l’appelait. Il n’était pas dispensé de combat et de loyauté au clan sous prétexte qu’un chaton s’était perdu. Il l’attrapa par la peau du coup, en s'efforçant toujours de rester délicat dans le moindre de ses mouvements, et l’amena vers la pouponnière.

***

Courant à vive allure, Cœur de Pluie arriva en vue du champ de bataille. Il eut une dernière pensée pour la petite innommée, qu’il avait confiée à une reine restée de garde. Elle ira bien, tout ira bien. Il chercha son frère des yeux mais ne le trouva pas. Les chats étaient moins nombreux que lors de son départ, mais il restait suffisamment d'opposants pour perdre. Les chats de l’Ombre ne devaient pas se relâcher maintenant. L'angoisse lui nouant la gorge, il se jeta dans la mêlée, toutes griffes dehors.

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