Small steps, big dreams [Taïpan&Feu]

Petit Taïpan jouait avec le pelage de sa mère, plutôt ennuyé de devoir rester cloîtrer dans la pouponnière. Certes, il y faisait chaud et bon vivre, mais ce n’était pas une vie d’être enfermé. Tous les autres chats étaient, apparemment, dehors. Enfin, c’était sans compter sur les autres chatons. Ceux de Révolte des Vents qui s’agitaient partout. Ils étaient un peu plus âgés et cela se remarquait. Ils étaient bruyants, maladroits et brutes. Ils commençaient aussi à fourrer leur nez où ils ne le devaient pas ! Le seul que l’argenté appréciait un peu, c’était un des rouquins. Petit Feu. Difficile de dire s’ils étaient amis, peut-être étaient-ils trop jeunes pour comprendre ce que ça signifiait, mais il était de loin celui avec lequel il préférait discuter. Les autres étaient ennuyants ou déjà amis avec Petit Gris et ça ne l’intéressait pas de rester collé à son demi-frère. Il y avait bien Petite Coronelle, mais il ne voulait pas non plus être scotché à elle. Ils étaient déjà si souvent ensemble. En parlant de sa sœur, il ne l’avait pas vu partir. Il ne savait pas trop où elle avait bien pu aller. Sûrement auprès de leur père ?

À l’entente du miaulement qui lui était adressé, il tendit son cou par-dessus les pattes de sa mère endormie, la tête sur le côté. Petit Feu l’appelait, s’étant extirpé de l’étreinte de sa propre mère. Le serpent gesticula pour se défaire de l’emprise de l’adulte sans la réveiller pour arriver devant le rouquin. Il faisait toujours mal aux yeux, celui-là... Il avait ce grand sourire, ces yeux pétillants, cette voix trop dynamique... Mais bon, c’était cette différence qui faisait qu’ils s’entendaient bien, enfin, c'était ce que disait sa mère. Il lui avait parlé d’un super rêve, mh. Le matou fit semblant de bâiller, par avance ennuyé. Néanmoins, il n’avouerait pas que sa présence l’avait au moins sorti de sa léthargie. Il lui lança un regard en coin, ses yeux vairons dans ceux verts de son interlocuteur. Il s’assied, léchant maladroitement sa petite patte.



L’air espiègle, il enroula sa queue touffue autour de lui. Bien qu’un peu moqueur, il était tout de même content qu’il ait pensé à lui pour le lui raconter, alors il le bouscula gentiment de l’épaule, l’incitant à commencer son récit.

Petit Feu hocha vivement la tête, l’air tout à fait certain que ce rêve était bien plus amusant que le précédent. À vrai dire, Petit Taïpan n’en doutait pas. Le rouquin avait une imagination débordante et il semblerait que chacune de ses nuits soit mouvementée par des rêves plus étranges les uns que les autres. Le gris, lui, n’en faisait que rarement et ils n’étaient pas très importants la plupart du temps. Était-ce parce qu’il était le fils du chef que le monde des rêves lui était plus ouvert ? En l’entendant miauler qu’il était, le temps d’une nuit, devenu le chef, il éveilla instantanément l’intérêt du petit serpent. Comme la plupart des chatons, les histoires de guerre, de grandes batailles et de règne le faisaient vibrer. Bientôt, cette envie de suprématie sera son unique objectif. Il s’imaginait déjà : Étoile du Taïpan, chef incontesté au pouvoir sans limites, le plus grand félin, une légende qui étendra les terres du Clan du Tonnerre jusqu’à l’infinie. Savoir que Petit Feu aspirait aussi à ce genre de rêve avait fait naître en lui un sentiment nouveau, celui de la rivalité. Bien sûr, ça ne changeait rien à l’amitié qu’il ressentait pour lui, mais ils seraient maintenant des rivaux !

Il fit mine de réfléchir à sa question alors que la réponse était toute trouvée. S’il était chef, il ferait de son Clan le meilleur ! Il combattrait tous les autres meneurs pour les soumettre. Mais il savait que tout cela n’était pas possible, pas pour le moment. Il n’était même pas encore apprenti. Ce n’était qu’un chaton, un peu dodu. Le rouquin, lui, avait un père chef. Ce n’était pas rien. Peut-être que la force et le courage d’Étoile Embrasée coulait aussi dans ses veines ? Être chef, ça se transmettait ? Le chaton aux yeux verts ne mit pas bien longtemps pour bomber le poitrail et lancer sa première idée : forcer Petit Gris à enlever les tiques de tous les Anciens, rien que ça. Petit Taïpan rigola, hochant vivement la tête en signe d’approbation. Petit Gris avait beau être son demi-frère, il ne l’appréciait pas plus que cela et c’était réciproque pour son ami. Certes, il n’aimait pas qu’on s’en prenne au gris, parce qu’il estimait que ça entachait aussi sa propre réputation, mais dans un contexte pareil, il se ferait un malin plaisir à le voir condamner à retirer des tiques pour le restant de sa vie.

Son rire disparu quand Petit Feu lui intima qu’il ferait de lui son lieutenant. Un sourire provocateur s’afficha sur la petite moue de celui aux yeux vairons, qui se leva d’un air de défi :



Il le regardait, l’air de dire, lequel de nous deux y arrivera en premier ? Ce qui ressemblait à un jeu deviendrait finalement sa plus grande motivation. Mais pour le moment, ce n’étaient rien de plus que des paroles. Petit Taïpan lança un regard en arrière. Sa mère dormait profondément, comme celle de son ami, ce qui voulait dire qu’ils étaient libres de leur fausser compagnie. Son sourire s’allongea d’autant plus et il se rapprocha du rouquin pour lui chuchoter à l’oreille :



Sans véritablement attendre de réponse, il se mit à clopiner vers la sortie. Il était encore si petit qu’il lui était normalement déconseillé de sortir de la pouponnière sans adulte. Mais après tout, ce n’était pas interdit, seulement déconseillé. La lumière du soleil l’aveugla un instant, tandis qu’il se retourna vers la petite boule de flammes derrière lui :