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 Nostalgia [feat. Nuage des Lunes]

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MessageSujet: Nostalgia [feat. Nuage des Lunes]   Nostalgia [feat. Nuage des Lunes] 3horlo10Mar 13 Mar 2018 - 14:59

Coeur de Genêt


Dans l'obscurité de cette froide nuit d'hiver, une ombre se faufila discrètement hors du camp du Vent. Un panache de vapeur translucide s'échappait de sa gueule et de ses narines à chacune de ses expirations. Le petit félin, qui n'était autre que Cœur de Genêt, avait réussi à quitter le camp en empruntant une brèche dans les remparts de ronces qui entouraient le lieu de vie du Clan du Vent. Il avait remarqué cette faiblesse dans la barrière quelques levers de soleil plus tôt. Le jeune guerrier avait choisi de la garder secrète pour son usage personnel et ne pouvait que remercier sa bonne fortune que personne ne l'eût encore découverte. Cependant, un semblant de mauvaise conscience lui affirmait qu'il agissait mal en taisant cette faille, et qu'un chaton aurait vite fait de la découvrir et de quitter l'enceinte protectrice pour s'aventurer sur le territoire mettant ainsi inutilement sa vie en péril. C'est pourquoi Cœur de Genêt, qui était rarement appointé aux patrouilles, gardait en permanence un œil attentif aux chatons du Clan quand ceux-ci étaient de sortie dans le camp. Il s'installait alors non loin de la petite ouverture et observait sans en avoir l'air la relève du Clan du Vent, les yeux mis-clos, le pelage gonflé pour se protéger du froid.

Cette nuit-là, il se félicita une fois de plus de sa découverte. Depuis que Forêt des Murmures lui avait barré le passage vers la sortie lors d'une nuit particulièrement mouvementée, Cœur de Genêt s'était senti plus que jamais prisonnier des enceintes du camp, et savoir qu'il lui était désormais impossible de sortir au beau milieu de la nuit sans rendre de compte à quiconque lui était plus que plaisant. Il avait quelques fois besoin de s'aérer l'esprit, en particulier après s'être réveillé en tremblant suite à un cauchemar resurgi de son passé. Ce qui avait été une fois de plus le cas cette nuit-là. Son sommeil était toujours hanté par sa défunte mère, et son doux visage aux traits déformés par la douleur flottait encore dans sa mémoire. Cette vision, bien que totalement imaginaire, le torturait régulièrement, et l'intensité de la douleur liée à la perte de sa mère le disputait à celle de sa culpabilité. Il ne pouvait se résoudre à se reconnaître responsable de sa mort, et pourtant, au plus profond de lui-même, il savait que c'était le cas. Un long frisson courut le long de son échine alors qu'il trottinait à une allure régulière à travers la lande balayée par une froide bise. Son cœur déjà en morceau se serra dans sa poitrine et une vague de chagrin frais se déversa dans son âme.

Il aurait voulu s'arrêter, renverser la tête en arrière et hurler sa peine au ciel, mais il ne pouvait et ne devait pas. Il alerterait ses camarades à l'ouïe fine, ainsi que tous les prédateurs nocturnes, tels renards et blaireaux, qui se feraient alors une joie de le traquer pour en faire leur repas. En des temps moins durs il n'aurait probablement rien risqué, mais tous les animaux de la forêt de Cerfblanc étaient affamés, la faute à l'hiver qui se prolongeait sans jamais vouloir cesser. Cœur de Genêt n'avait que la peau sur les os et probablement la chair très filandreuse et coriace, mais en ces temps troublés un renard ou un blaireau au bout du rouleau ne rechignerait pas sur cette proie facile, aussi famélique fût-elle. Aussi poursuivit-il son chemin en silence, uniquement bon à pleurer et se lamenter dans l'espace à la fois étroit et infini de son esprit. Il crût devenir fou alors que les pensées tourbillonnaient rageusement sous son crâne et il finit par se mettre à courir éperdument à travers la lande, aveuglé par sa souffrance spirituelle. Bientôt celle-ci diminua considérablement en intensité pour laisser place à une douleur palpable, bien plus réelle et tangible : celle de ses poumons embrasés. Il ralentit l'allure jusqu'à s'arrêter complètement, le souffle court, les voies respiratoires comprimées dans un étau impitoyable. Alors une chose extraordinaire se produisit. Pour la première fois depuis le début de ses crises, il ne paniqua pas. Pas une once d'angoisse ne vint se loger dans le creux de son cœur. Il se contenta de rester immobile, le regard perdu dans le vague en tentant de calmer son pouls et ses inspirations frénétiques et inefficaces qui se prenaient dans le fond de sa gorge contractée.

Bientôt l'air vif de la nuit entra de nouveau librement dans ses poumons. Cœur de Genêt put alors se concentrer sur son environnement. Il se trouvait au pied de la crête qui surplombait la clairière des Quatre Chênes. Face à lui, le ciel commençait à pâlir, virant d'un noir profond à une teinte indigo. L'aube était proche. Il lui faudrait bientôt rentrer. Il ne voulait pas que l'on s'aperçût de son absence. Cependant il doutait que quiconque remarquât qu'il manquait à l'appel. Il se savait insignifiant et aussi gris qu'une souris, tant au sens propre qu'au sens figuré. Quelques fois cette condition lui pesait, et il en voulait à la terre entière d'être aussi dispensable et anodin. Mais pas aujourd'hui, bien au contraire. Il vit ce statut d'être à la limite de l'inconsistance aux yeux de ses camarades comme l'un des rares dons qu'il possédait et qui lui permettrait de s'accorder un peu de temps solitaire ce matin-là. Il se résolut à rentrer quand bon lui semblerait, et pour se donner bonne conscience, il se fit la promesse de chasser sur le chemin du retour. Être sans importance ne voulait pas pour autant dire qu'il ne pouvait apporter sa contribution au bien du Clan qui l'avait élevé et au sein duquel il vivait. Alors que ces pensées traversaient son esprit, il réalisa qu'il commençait à faire la paix avec cette vérité qui était la sienne. Il en fut bien aise.

Il s'engagea sur la pente menant au sommet de la crête qui le dominait de sa hauteur, le cœur étrangement léger, comme soudain libéré d'un des innombrables fardeaux qu'il traînait depuis sa plus tendre enfance. Alors qu'il arrivait près du sommet, s'élevant ainsi un peu plus près du ciel pâlissant de l'aube, l'avenir lui parut soudain beaucoup moins sombre et incertain. Il ne le savait pas encore, mais un jour la solution à tous ses maux se présenterait à lui de manière évidente et toute naturelle. Un semblant de foi s'alluma en lui, mais si discrètement qu'il ne s'en aperçut pas. Cette infime lueur d'espoir était aussi faible et vacillante que la flamme d'une bougie en fin de vie mais, tout comme Benjamin Button à l'horloge biologique inversée, elle ne pourrait que croître et gagner en vivacité à l'avenir. Bien que le terreau ne fût pas particulièrement fertile, la petite graine qui s'était implantée dans l'âme de Cœur de Genêt était coriace. Ses futures racines ne manqueraient pas de s'ancrer profondément dans son substrat, tout en tentant d'y déloger les mauvaises pousses que constituaient entre autre la peur, l'auto-apitoiement et la morosité qui caractérisaient tant le petit guerrier.

En grande partie inconscient de l'ébauche de changement qui s'opérait au plus profond de lui-même, Cœur de Genêt arriva au sommet de la crête. Son regard plongea en contrebas, dans le vallon qui baignait dans une épaisse obscurité. Il pouvait à peine distinguer le grand rocher qui se dressait au centre de la combe, entre les chênes, et d'où les meneurs s'adressaient aux chats de Clan lors des Assemblées. Jamais Cœur de Genêt n'avait assisté à l'une d'entre elles. Les Clans ne se rassemblaient plus depuis longtemps. Si l'on en croyait les dires de certains de ses camarades plus âgés, qui avaient été présents lors de la toute dernière Assemblée, un événement effroyable était arrivé. L'apparition des fameuses Etoiles Noires et les menaces qu'elles avaient proféré. Toujours selon les dires des chats claniques, il s'agissait des âmes tordues d'anciens guerriers, qui étaient revenues d'entre les morts pour semer la discorde et le chaos. Tout comme le Clan des Etoiles était composé des anciens membres de Clan disparus, veillant sur leur descendance, et de nouveau unis dans la mort. Les guérisseurs se plaisaient à interpréter des signes qu'ils croyaient discerner dans leur environnement et soi-disant envoyés par les ancêtres.

Cœur de Genêt ne partageait pas ces croyances, qu'il considérait comme absurdes. D'après lui, des essaims d'abeilles bourdonnaient dans le crâne de ses camarades croyants. Il n'y avait pas de Clan des Etoiles, tout comme il n'y avait pas d'Etoiles Noires. Il s'agissait de contes et légendes montés de toutes pièces pour inciter à la bonne conduite et effrayer les chatons désobéissants. Ces croyances servaient le dessein des grands des Clans, tels les meneurs et les guérisseurs qui, par leur prétendue relation privilégiée avec le Clan des Etoiles et avec leur aval, inspiraient le respect et maintenaient leurs Clans unis tout en entretenant un semblant d'ordre en leur sein. Bien sûr Cœur de Genêt gardait cette vision des choses pour lui, de manière à ne pas offusquer ses camarades croyants, mais si on lui demandait alors de justifier l'apparition des Etoiles Noires lors de cette nuit fatidique ainsi que le récit en tout point similaire des nombreux témoins présents, il avançait une hypothèse que toutes les oreilles ne pouvaient se résoudre à entendre. Il parlait d'hallucination collective, tout simplement engendrée par un état de tension extrême entre les Clans. Il suffisait qu'un membre éminent crût que les Etoiles Noires étaient alors présentes parmi eux, et par un simple effet de suggestion sur les esprits de ses pairs subjugués, cette réalité devint également la leur. Le pouvoir de l'esprit est infini et mystérieux.

Cœur de Genêt entreprit la descente vers les Quatre Chênes. Tout en progressant à travers les hautes herbes recouvertes de givre, il se demanda quelles sensations il aurait eu s'il se rendait à une Assemblée, avec ses camarades à ses côtés. Il s'imagina dévalant la pente à leur côté, et une impression de puissance s'invita en lui. L'union fait la force. Il saisissait pleinement le sens de cette affirmation, ou du moins le pensait-il. Il se figura alors que la clairière était déjà remplie des félins des quatre autres factions de la forêt. Le second sentiment à l'envahir fut alors la confusion devant un tel mélange d'odeurs, rapidement suivi d'une sensation d'intimidation de par la présence de tant de félins inconnus et potentiellement hostiles. Puis vint l'émerveillement lorsqu'il se représenta les silhouettes des meneurs au sommet du Grand Rocher se découpant contre le ciel étoilé et la pleine lune. Et enfin l'excitation et le calme se disputant la place dans son cœur lors des débats enflammés entre les chefs. L'épuisement vint clore le cortège d'émotions rêvées par le petit félin gris, alors qu'il tentait de reconstituer le déroulement d'une Assemblée à la seule force de son psychisme. Les participants des Assemblées devaient se trouver heureux de retrouver leur nid douillet en rentrant après ces nuits mouvementées.

Le guerrier du Clan du Vent revint au moment présent, constatant avec surprise que le ciel avait viré au gris sombre caractéristique de l'épaisse couche nuageuse qui régnait en permanence sur la forêt de Cerfblanc. La faible luminosité du jour naissant chassait peu à peu les ombres nocturnes, les forçant à retourner se tapir dans les ténèbres d'où elles étaient issues en attendant la venue de la nuit prochaine. Cœur de Genêt s'avança lentement, précautionneusement et avec une étrange déférence du Grand Rocher. Il leva les yeux vers le sommet. Il murmura une excuse inaudible qui se perdit en un panache de vapeur blanchâtre dans l'air froid pour le crime de lèse-majesté qu'il s'apprêtait à commettre. Il banda ses muscles et en quelques bonds se trouva assis sur le point culminant du Grand Rocher, dominant le vallon qui s'étendait sous ses pattes. Pour la première fois de sa vie, Cœur de Genêt compris ce qu'être grand signifiait et il ne put que savourer cette sensation totalement inédite. Seule la cime dénudée des chênes le dominait encore. Mais il ne se risquerait pas à y monter. Il n'était pas fait pour grimper aux arbres, il n'en avait que trop conscience. Il n'avait aucune envie de se briser le cou. Il se contenta de ce qu'il avait déjà. L'état dans lequel il se trouvait à présent était plus proche du bonheur que tout ce qu'il avait pu expérimenter depuis la mort de Cœur de Pavot. A la simple évocation de son souvenir, le visage de sa mère réapparut devant ses yeux psychiques, mais cette fois son expression était sereine, douce et aimante, comme elle l'avait toujours été de son vivant.

Cependant sa quiétude fut bientôt troublée par l'apparition d'une nouvelle odeur. Un fumet aux relents poissonneux. Cœur de Genêt resta immobile, perché sur son rocher. Il parcourut la clairière d'un regard scrutateur, aussi perçant que celui d'un aigle. Tous les sens en alerte, il finit par distinguer une petite silhouette au pelage gris et blanc s'avancer dans la combe. Sa tension se relâcha brusquement. Il ne s'agissait que d'une toute jeune apprentie. Il ne craignait rien. Il se conforta dans l'idée qu'il n'avait enfreint aucune règle du code du guerrier. Les Quatre Chênes étaient des terres neutres, n'appartenant à personne. Même si un guerrier particulièrement vicieux pouvait toujours trouver une bonne excuse pour passer un félin d'un Clan adverse à tabac, territoire neutre ou pas. Cœur de Genêt ne bougea pas de son perchoir et regarda la petite approcher, se demandant si elle venait tout juste d'arriver ou si elle avait eu le culot de l'espionner avant de se montrer. L'expression du petit matou était fermée et l'éclat qui brillait au fond de ses prunelles, glacial. Il en voulait déjà à la nouvelle venue de déranger ce moment de paix qui n'appartenait qu'à lui seul.
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Rosée du Matin
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MessageSujet: Re: Nostalgia [feat. Nuage des Lunes]   Nostalgia [feat. Nuage des Lunes] 3horlo10Dim 18 Mar 2018 - 4:03

Personnage Incarné :
~ Nuage des Lunes ~



Je dormais sereinement, rêvant de bons repas et de paresse au soleil. L’idylle en somme.. Mais voilà qu'au beau milieu de la nuit, je me réveillais en sursaut découvrant un corps de félin avachi sur le mien. Grognant à en réveiller tout les apprentis, je le poussais pour remettre la novice dans son lit. Si c'était encore l'un de ses mâles galeux, il aurait tâtait de mon coup de patte mais là.. C'était qu'une jeune apprentie. Elle était arrivé, il y a à peine une lune. Elle devait encore s'habituer à sa nouvelle tanière. Je jetais un dernier regard endormie à la novice avant de sombrer de nouveau dans le sommeil.

La nuit était presque terminée cette fois, et un nouvel événement me réveillait en sursaut. Ils s'étaient donné le mot, c'était pas possible autrement. J'ouvrais donc des yeux colérique avant de croiser le regard d'un apprenti sentant qu'il avait fait une bêtise. Il reculait en me voyant me relever. Je lui sortais une réplique cinglante avant de lui asséner un coup sur le crâne et de sortir de la tanière des novices en le poussant sans ménagement.

Voyant ma colère percer dans mon regard, la garde n'osait même pas m'empêcher de sortir. Elle avait été témoin d'une partie de la scène après tout. Marchant sur l'ensemble du territoire de mon clan avant de passer en terre libre, histoire de trouver un coin pour dormir en paix. Je m'arrêtais au quatre chênes, m'installant dans un coin à l'écart avant de fermer les yeux. Mais avant de pouvoir dormir profondément, une odeur étrangère m'empêchait de sombrer. Je me redressais en grognant avant de rejoindre la source de l'odeur. Un membre du clan du Vent.. Génial. Pour la paix et la tranquillité c'était raté. Le guerrier me fixait d'un regard froid, je m'avançais jusqu'à lui avant de lâcher :

"-Arrête donc de me fixer comme ça. Moi aussi je pensais être tranquille en ce lieu. On dirait qu'on c'est trompé tout les deux."

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