Une raison de vivre est aussi une excellente raison de mourir | Ft Feufoo

Rêverie du Loir

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Les nuages formaient une immense étendue de coton gris, cachant les rayons du soleil et annonçant une pluie à venir. Mais ils n'étaient tout de même pas menaçants ou complètement noirs, laissant encore quelques heures avant que l'orage n'éclate et n'inonde le territoire de pluie et d'éclair. Est-ce que cela voulait dire que partir chasser valait le coup ? Pas vraiment, à coup sûr les proies avaient également senti la pluie et étaient parti se cacher.

Ainsi, Rêverie du Loir restait planté devant la tanière des guerriers à réfléchir à ce qu'il pourrait faire. Et s'il restait assez longtemps immobile et que tout le monde l'oubliait, il pourrait peut-être retourner se coucher, ce n'était définitivement pas une journée donnant envie de sortir.

Alors que le matou débattait intérieurement, il aperçut Nuage Enchanté entrant dans le camp. Son cœur eut un pincement en la voyant seule. La Marée Noire avait beaucoup volé aux Clans et ils en étaient également victime. Sa petite sœur, Nuage de Menthe n'était plus. Certains disaient que se tuer à la tâche était une expression, elle ne l'avait pas été pour sa sœur malheureusement... Peut-être qu'ils ne partageaient qu'un seul parent mais cette perte avait énormément affecté Loir qui s'en voulait de ne pas avoir vu l'apprentie se donner corps et âme jusqu'au bout. Et cela avait également beaucoup touché Nuage Enchanté...

Se décidant finalement sur son activité de la journée, Loir se leva et alla voir sa demi-sœur. Tous deux étaient d'humeur assez sombre depuis l'enterrement de Nuage de Menthe mais n'avait pas eu le temps d'échanger et de se consoler. Il avait directement fallu s'occuper des nombreux morts de la marée noire puis de renforcer le clan et maintenant, avec la montée des tensions, tous étaient à cran et personne n'avait le temps de se reposer un instant.

La météo n'arrangeait absolument rien à l'humeur maussade de la majeure partie des chats présents dans le camp alors autant sortir un instant, prendre l'air pour discuter un peu de sujet plus léger. C'était ce que comptait proposer le matou roux en s'approchant de l'apprentie à pas de velours.

« Nuage Enchanté ? Que dirais-tu d'aller marcher un peu avec moi, afin de profiter un peu du temps libre avant la pluie ? Le Clan peut parfaitement survivre sans nous pendant quelques temps, ne t'inquiète pas nous n'irons pas loin. Je pensais aller voir la source de l'Arbre tordu. »

Rêverie du Loir espérait vraiment que l’apprentie accepte sans trop discuter, qu’ils puissent s’éloigner un moment du camp à l’ambiance électrique pour profiter d’un moment de calme. Cela faisait si longtemps qu’ils n’avaient pas pu discuter, juste eux deux, tranquillement de tout et rien. Le rouquin ne souhaitait même pas spécialement aborder le cas de Nuage de Menthe, il ne voulait pas vraiment remuer de souvenirs douloureux.

Souriant à sa sœur, il attendit sa réponse avec une légère impatience assez exceptionnelle pour lui. Il ne faisait peut être pas beau et ce n’était peut être pas le meilleur moment pour prendre un instant de pause mais Loir en avait vraiment besoin et il savait que Nuage Enchanté aussi.

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Best Ship aka le Choupy:

Nuage Enchanté
"Dans les larmes ou dans les cris
La victoire
Triomphera toujours"

Ses yeux s'ouvrent, son corps s'étire, ses pattes se lèvent et se soulèvent. Paupières tombent, irrésistiblement attirées par les bras de Morphée. Mais dans une effort maintenant devenu surhumain, elles restent droites, vaillantes, et remplisse leur rôle. Nuage Enchanté restera éveillé, elle le doit. C'es mouvements sont à présent plus que mécaniques, comme ancrés dans une routine qui chaque jour la peine un peu plus, li rappelant ce manque puissant qui à toutes les heures de la longue journée tiraille son esprit. Estomac noué, gorge serrée, yeux fatigués, tête douloureuse. Et bouche fermée, dont pratiquement plus aucun son ne sort aujourd'hui. La fougueuse, bavarde et insolente Nuage Enchanté s'est transformée en une presque, certes, mais tout de même presque guerrière triste, amère et silencieuse. Au fond d'elle elle sait bien que Nuage de Menthe n'aurait pas accepté sa réaction. Mais elle ne peut se résigner à vivre une vie heureuse et tranquille. Peut-être qu'une jour elle y parviendra, peut-être, mais en attendant la tristesse et le souvenir de sa défunte sœur l'ensevelissent et l'empêche de respirer. Elle aimerait pouvoir parler, se confier, mais même avant de connaître les malheurs de la vie, la femelle n'était pas en capacité de s'ouvrir aux autres. A tous, sauf sa sœur. Il avait bien sûr quelques amis, dont son frère qu'elle aimait beaucoup, mais rien n'était et ne sera jamais pareil qu'avec Menthe. Elles étaient en quelques sortes jumelles, unies par le lien sacré de l'amour.

Nuage Enchanté respira longuement, profitant de l'air frais et revigorant de l'extérieur. Puis le froid la frit frissonner et son regard se tourna immédiatement vers la tanière de sa chère guérisseuse, Rose Délicate. C'était ici que Menthe était née et morte, avait vécu les plus grands moments et les plus grandes fiertés de sa vie. Elle se souvient encore de la fois où sa sœur était devenue apprentie guérisseuse, de sa joie et celle de son mentor, et de l'étreinte humide des deux jumelles lors de l'annonce. Une petite larme coula le long de sa joue, mais elle l'essuya rapidement et détourna le regard. Elle ne voyait le Clan maintenant que comme un écrin de douleur, une cage dorée qui l'enfermait dans sa tristesse.

Elle se dirigea doucement vers le centre du camp, ouvrant réellement les yeux pour la première fois de la journée. Elle n'était pas la seule déjà réveillé : quelques guerriers s'activaient avant la pluie, deux ou trois apprentis somnolaient en écoutant les longues histoires des anciens, et les chatons encore innocents et naïfs couraient après les papillons. Le tas de gibier fit de l'œil à l'Enchantée, mais elle entendit quelqu'un l'appeler avant qu'elle ait pu assouvir sa faim. Rêverie du Loir.

Rêverie du Loir avait toujours été présent pour elle et sa sœur, dans les plus tristes comme dans les meilleurs moments. Ils n'avaient peut-être pas exactement le même sang, le même père, mais il avait pourtant toujours été son frère et le sera toujours. A vrai dire, les deux n'avaient pas beaucoup discutés depuis la mort de Nuage de Menthe. Seulement échangés une étreinte triste et humide, une caresse, un sourire… Mais rien de plus. Et à l'impatience qu'elle entendit dans sa voix, Nuage Enchanté compris que le moment était venu pour eux de se confier, accepter leur tristesse et leurs sentiments.

Il y a quelques jours, peut-être quelques heures à peine, elle aurait refusé de le suivre. Mais aujourd'hui, elle sentit l'envie et le besoin de Rêverie du Loir, ainsi que le sien, et décida de marcher à ses côtés pour une matinée, peut-être plus, peut-être moins. Elle sourit gentiment au félin qui espérait surement, comme elle par ailleurs, une réponse positive.

"Tu pourras ainsi critiquer mes techniques de chasse. Bonne idée."

Et les voilà partis à travers monts et montagnes à la recherche du bonheur. Elle se rapprocha alors de lui et posa sur ses yeux un regard mélancolique.

"Alors, Loir, comment tu vas, après tout ça ?"

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Rêverie du Loir

Honnêtement, Loir ne s'attendait pas directement à une réponse positive. Il s'attendait plutôt à quelques hésitations, peut-être même une excuse ou deux pour ne pas venir. Ils avaient si peu parlé depuis que Nuage de Menthe... S'étaient-ils évités pour ruminer leurs douleurs chacun dans leur coin, n'osant pas l'affronter et la partager à deux ? Ce n'était pas l'impression du rouquin mais impossible de l'affirmer, on devenait tous si irrationnel face à la douleur...

Mais Nuage Enchanté ne refusa pas sa proposition. Elle l'accepta même sans difficulté, ajoutant qu'il pourrait ainsi juger de ses techniques de chasse. Ce n'était pas du tout le but de l'entreprise mais il ne la contredit pas pour autant. L'occasion était là et il devait la saisir.

Les deux chats se mirent donc doucement en marche, en direction de la Source de l'Arbre tordu. Le chemin n'était certainement pas bien long, ce n'était guère loin du camp après tout. Mais cela allait leur permettre de prendre l'air et de passer un petit moment ensemble. Le museau triste et fatigué de Nuage Enchanté se tourna vers lui, demandant comment il allait. C'était le guérisseur qui se fichait de l'herboriste, elle avait l'air d'aller aussi mal que lui, si ce n'est plus ! Mais le rouquin ne fit pas la moindre remarque à ce sujet, se contentant de répondre sur le même ton.

« Oh tu sais... On fait aller tant bien que mal, il le faut bien après tout. Loir eut une petite hésitation avant de continuer. Et toi ? »

Soucieux, le matou ne savait pas quoi ajouter. Sa sœur semblait à mille lieux de la jeune apprentie énergique qu'elle était il y a quelques lunes de cela. Peut-être que simplement être présent pour elle suffisait, l'éloignement n'avait que peu marché après tout. Voir Nuage Enchanté seule, sans sa sœur, était douloureux mais pas autant que de la voir sombrer petit à petit dans une telle tristesse. Il était son grand frère après tout, il devait être à ses côtés dans les moments difficiles.

Le ciel continuait de s'assombrir, annonçant les précipitations à venir, semblable à un miroir de leurs noires émotions. A croire que la météo cherchait à les imiter et à déverser sa tristesse en une pluie abondante. Ils étaient presque arrivés à la source, s'ils ne tardaient pas peut être qu'ils pourraient l'éviter ? Ou bien ils affronteraient la pluie, espérant qu'elle lave leur détresse. Dans tous les cas, Loir laisserait la décision à sa petite sœur, l'eau n'était rien face à son bonheur.

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