Et si on dansait sous la lumière de la lune ?

Brume Argentée s'était tournée et retournée dans son lit de bruyère et de mousse, elle n'avait qu'une idée en tête : minuit. Mais alors que la lune était encore bien basse dans le ciel, ce qui envisageait qu'il était loin d'être cette heure ci, elle se forçait à rester couchée, le cerveau en ébullition de questions. Sa mère dormait paisiblement près d'elle, le corps se soulevant à peine tant sa respiration était lente et basse. Paisible. Elle l'observait un moment se questionnant sur la façon dont elle allait devoir sortir sans la réveiller, car bien que Flocon de Neige avait le sommeil apaisé, il n'en était pas moins léger, et à la moindre grosse agitation, celle ci ouvrirait des yeux plein d'interrogation. Elle allait devoir faire ça bien et vite. Pas question d'éveiller tout le Clan ! Elle avait pourtant l'habitude de filer en douce la nuit, mais ce soir là, sa mère avait tant insisté pour dormir au près d'elle, qu'elle n'avait pu refuser, et elle était maintenant dans une impasse. Surtout si elle avait à se justifiée, depuis la nuit des temps, les chats des clans en rejoignaient d'autres, secrètement, à la nuit tombée, mais ça n'avait jamais était vu d'un bon œil, et elle trouvait ça encore plus excitant puisque ça en était interdit.

La guerrière d'argent posa ses pattes sur sa tête et s'assoupit enfin, elle se réveilla en sursaut, bien plus tard, des masses s'étaient accumulées en plus dans la tanière des guerriers, et dormaient profondément, elle se rendit compte que la patrouille de minuit était déjà rentrée, quel heure était-il ? Elle était en retard, la guerrière blanche l'attendrait-elle malgré tout, où penserait-elle que Brume Argentée s'était dégonflée ? Hors de question, ce n'était pas son genre. Elle s'extirpait lentement de la tanière, prenant soin d'éviter toute brindilles potentielles de se briser en un écho, elle repéra la sentinelle qui montait la garde à l'entrée du Clan, réfléchit à toute vitesse et prit un cailloux assez gros qu'elle lança dans la direction opposé, celui ci atterrit dans un bruit sourd, et le guerrier se retourna brusquement, aux aguets, elle resta silencieuse en l'observant, mais celui-ci ne cilla pas d'un poil. La guerrière grise pesta intérieurement et répéta à nouveau son mouvement, avec non pas un mais deux cailloux qui se répercutèrent dans des buissons bien plus loin. Cette fois ci le guerrier se dirigea lentement vers la source du bruit, et Brume Argentée en profita pour filer vers l'entrée où elle s'élança à toute allure, elle courait avec grâce et liberté, la brise soufflait dans sa fourrure d'argent, elle se souvint, sans trop de mal le chemin qu'elle avait empruntée quelque jours auparavant lors de l'Assemblée, elle se faufilait aisément entre les rochers et les troncs rapprochés des arbres, elle courait tellement vite qu'elle volait presque. Ses yeux scintillaient comme deux joyaux incandescents dans la nuit, la lune illuminait à peine le ciel, fin morceau blanchâtre valsant entre les étoiles.

Elle aperçoit enfin les cinq rocs, majestueux et sacrés, qui s'élevaient hauts touchant presque le ciel, elle scrutait les alentours à la recherche d'une silhouette blanche, spectre céleste dans l'obscurité de la nuit, mais elle ne l'aperçut nul part. La guerrière avait trop attendu et était rentrée, déçu et fâchée ? Brume Argentée ne pouvait pas croire à un tel scénario, elle errait entre les rocs rugueux, ses coussinets rappant sur la surface dur.

"- Vestale Céleste, es-tu par ici ?"

Sa voix s'éleva faiblement, effacé par le vacarme du vent et des vagues, elle ne voyait personne nul part, finalement, la guerrière immaculée avait dû vraiment abandonnée. Où peut-être n'était-elle jamais venue ? Elle soupira.

"- Allons, ne fais pas la timide voyons, et dit moi que je n'ai pas fait tout ce chemin pour rien ?"

Elle avait déjà remarquée que la guerrière était de nature très introvertie et peut-être celle ci n'osait pas se montrer ? Elle n'en savait rien, mais tester sa dernière carte sur cette chance, ne voulant pas renoncer et faire demi-tour, elle savait qu'elle avait eu énormément de retard, mais c'était un risque lorsqu'on vivait dans un Clan muni de plusieurs guerriers et sentinelles. Elle s'allongea, le visage au vent, profitant de l'air marin. Elle ferma les paupières, si l'autre n'était pas venu où était repartie, elle resterait au moins à profiter du paysage et de la brise douce.

Elle s’enfuie comme une voleuse. Elle est une voleuse. A ses yeux, tout du moins. Elle est une voleuse de nuit, une voleuse de temps, voleuse d’une identité qui n’est pas la sienne. Car la Vestale Céleste qui court à présent sous la lumière pâle du croissant de Lune, sous les yeux pleins de mépris des étoiles, ce n’est pas elle. La Vestale Céleste qu’elle connaît est loyale, elle ne flanche pas. Elle ne frémit pas devant les yeux inquisiteurs des plus valeureux des guerriers, elle reste muette devant leurs invitations pour des nuits endiablées. Alors cette féline qui fend l’air en direction des cinq rocs, avec tellement de détermination qu’on pourrait croire qu’elle n’a rien à perdre, ce n’est sûrement pas elle. C’est une inconnue, une imposture. Voleuse, lui rabâche son esprit, voleuse. Honte à toi. Qu’est-ce que tu fais ? Menteuse. Elle ignore ces voix. Elle ne fait rien de mal, implore-t-elle silencieusement. Les amitiés ne sont pas interdites. Et pourtant, sa conscience reste solidement campée sur ses positions, comme si elle savait quelque chose qu’elle-même ignore.

En réalité, si elle paraît à présent si déterminée, c’est parce qu’elle a justement peur de ces hésitations. Elle sait qu’au moindre ralentissement, elle pourrait s’arrêter et soudainement se réveiller de ce songe étrange, ramenée brutalement à la réalité. Oui, elle pourrait décider de faire marche arrière, comme elle le devrait sans aucun doute. Elle redeviendrait avec docilité cette guerrière modèle qu’elle s’est toujours efforcée d’être. Qu’elle a toujours été, même encore durant la journée, pendant laquelle elle était persuadée qu’elle ne répondrait pas à l’invitation de la guerrière de la rivière. Quelle raison avait-elle d’y répondre ? Aucune. La journée avait été une journée comme toute les autres, et la nuit devait se dérouler de même. Elle avait tenté d’oublier, d’occuper son esprit à autre chose pour ne pas y penser. Ce soir. C’est ce soir. Et le soir était arrivé, et tout le monde s’était endormit alors qu’elle y pensait toujours. C’est cette nuit, est ce qu’elle y pense ? Elle a peut-être oublié. Sûrement en fait, elle devait dire ça pour blaguer. Et je l’ai cru, je suis vraiment stupide. Tout le monde dort, je pourrais aller voir… Juste pour vérifier. Personne ne le saurait. Oui, je pourrais. Et cette nouvelle possibilité était née, et son esprit ne cessait d’y retourner encore et encore, tu pourrais, tu pourrais. La tentation s’était dévoilée à elle, lui avait tournée autour, doucement d’abord, le chasseur amadouant sa proie. Puis elle lui avait envoyée des petites piques, ce serait tellement simple de partir, c’est la nuit, personne ne te verrait. Tu pourrais. Et elle pouvait. Alors elle avait abandonné, s’était lâchement abandonnée elle-même à cette tentation. Elle s’était échappée, voleuse dans la nuit, voleuse d’une nuit.

Elle s’est faite flèche dans cette nuit, invisible et silencieuse, ombre fautive cherchant seulement à s’éloigner le plus vite possible, essayant d’éclipser toutes les pensées s’interposant entre elle et son but. Et il approche, ce but. Elle voit se dessiner parmi les ténèbres les silhouettes des pierres se jetant à l’assaut du ciel, elle entend le doux clapotis de la rivière toute proche, formant une mélodie avec le doux souffle de la brise et le vacarme des vagues plus lointain. Et tous ces éléments forment avec l’obscurité qui lui fait face la plus plate et la plus ordinaire des nuits. Elle est tentée d’appeler, mais elle sait déjà combien cela serait inutile. Brume Argentée n’est de toute évidence pas dans les parages. Et d’une certaine manière, cette absence la réconforte. Cette absence est sympathique à Vestale Céleste, elle s’en ferait presque une amie. C’est une absence qui la soulage, la délivre d’un poids. Elle ne verra personne cette nuit, elle n’a rien fait de mal, elle ne fait que prendre l’air, seule, et tout va bien dans le meilleur des mondes, elle est à nouveau la douce guerrière sans histoire, et elle n’a aucun lien d’aucune sorte avec une certaine Brume Argentée. Elle en rirait presque. Mais elle n’ose pas le faire, car derrière tout cela, cette absence est aussi une trahison, une preuve de plus qu’elle est insignifiante, qu’elle ne compte pas. Elle en pleurerait presque. Elle est seule.

Elle se retourne, presque à regret mais en même temps rapidement, elle est pressée d’en finir, d’en terminer avec cette nuit maudite, de ne plus jamais en entendre parler. Elle va retourner dormir auprès des autres guerriers, et tout sera oublié, comme un mauvais rêve qui s’estompe au matin. Elle s’éloigne, fantôme qui se fond dans la nuit, s’habille de sa noirceur et disparaît finalement.

Elle croit d’abord rêver lorsqu’elle entend l’appel, les bruits diffus qui lui sont portés par le vent qui se fait son complice, lui transmet un message. Peut-être n’est-elle pas seule finalement. Elle n’avait même pas pensé à l’hypothèse d’un retard, d’un empêchement. Peut-être n’est-il pas aussi simple de s’échapper du camp de la Rivière que de celui de la Lune. Les hésitations reviennent l’assaillir aussitôt alors qu’elle fait volte-face. Elle se rapproche à nouveau timidement du lieu sacré, et aperçoit aussitôt Brume Argentée, silhouette calme assoupie dans la nuit. Et la nuit n’est plus du tout plate, elle est à nouveau pleine de possibilité, et la tentation cette vicieuse est revenue à l’assaut, emplissant l’air de cette nuit et les pensées de Vestale encore plus facilement qu’auparavant.

« C’est-c’est toi ? »

Cela sonne comme une question, mais ce n’en est pas une. C’est une constatation, un souffle de soulagement, une exclamation de surprise et de contentement. Mais c’est aussi une question d’une certaine manière, pourquoi es-tu là, pourquoi suis-je là, qu’est ce que tu crois qu’on fait ?

« Tu es en retard, tu as eu des soucis ? »

Cette fois ci, il y a un peu de colère dans sa voix. Une colère hésitante et assouplie, car Vestale ne sait pas faire dans le tranché, elle s’oblige toujours à être dans cette demi-mesure polie qui assure sa sûreté. Mais elle en veut à Brume Argentée, elle lui en veut de l’avoir attirée ici, de l’avoir fait patienter, hésiter. Il y a de l’inquiétude aussi, est-ce que tu vas bien ? Pourquoi tu es en retard bon sang ? Mais elle ne pose pas ces questions, elle n’en a pas le droit. Elle ne vient ici que pour une chose de toute façon. Avoir des réponses à ses questions, et être claire. Elle ne ressortira plus jamais de cette manière, elle ne veut rien avoir à faire avec les chats des autres clans. Elle doit le lui dire.

« C’est-c’est toi ? »

Brume Argentée se retourna brusquement, surprise par la voix très ténue de son amie, elle la remarqua dans sa robe immaculée, qui se mouvait dans la brise marine de la nuit, bien que ses yeux étaient superbes dans la nuit noire, c'était davantage le voile céleste de sa fourrure blanche qui brillait d'un éclat fantomatique sous les rayons de la lune encore arrondie dans le ciel qui la surprenait, la sienne brillait d'un éclat d'argent parsemée d'étoiles, elles restèrent un instant figées dans le temps et la beauté de la Lune, étrangement soulagée de se retrouver enfin, n'y croyant plus, ni l'une, ni l'autre, elles avaient secrètement tant attendu ce moment, où enfin, leurs regard atypique se croiseraient, pour ne plus se lâcher.

« Tu es en retard, tu as eu des soucis ? »

Elle sent la colère et l'empressement dans sa voix claire et douce, il y a quelque chose dans son regard, comme un reproche inavoué, une honte cachée, que pouvait bien penser la reine blanche ? Regrettait-elle sa venue ici, était-elle déçu de son comportement clandestin à son propre clan ? Brume Argentée la fixa un moment, sans rien dire, elle voulait juste savourer ce paysage, contraste de blanc pure sur une toile obscure, elle souhaitait au fond d'elle, qu'en laissant le vent dansait suffisamment longtemps entre elles, la pression de la belle blanche redescendrait, ce n'est qu'après un moment passé, un silence lourd et pesant, qu'elle brisa le silence.

« Oui. Elle marqua une pause, plongeant un peu plus ses yeux énigmatiques dans ceux de la guerrière blanche. Il y avait la patrouille de nuit et puis... Je me suis endormie, et j'ai ratée mon réveille, j'ai tellement attendu ce moment toute la journée que mon corps était fatigué, et mon cœur épuisé de palpiter autant. »

Elle laissa sa phrase un moment en suspens, la laissant faire son sens dans l'esprit de la guerrière blanche, elle espérait y faire son charme, c'est vrai qu'elle avait attendu ce moment, son attirance pour la guerrière de la Lune, la perturbait plus qu'elle n'avait jamais était perturbée auparavant, non pas parce que c'était une fille, elle en avait eu des prétendantes, mais parce que c'était elle, simplement, elle.
Sa personne tout entière lui indiquait de se rapprocher d'elle, de se frôler à sa fourrure voluptueuse, d'enrouler sa queue entours de ses fines épaules, mais son esprit lui hurlait de rester à sa place, elle ne la connaissait pas, pourquoi éprouver de tel émotions ? Elle changea sa ligne de vision, pour s'attarder sur les cinq rocs, elle avait toujours rêver s'étendre au dessus de ceux ci, ne comprenant pas pourquoi ce privilège était réservé aux meneurs des Clans, d'un bond incroyable, elle gravit les rochers, pour s'étendre sur le plus hauts des cinq rocs, de là, elle dominait toute la vallée, de sa splendeur et son étrangeté, elle ajouta à mi-voix.

« J'ai cru que tu ne viendrais pas.. »

Elle s'étendit de tout son long sur le roc sacré, tel une déesse céleste, sa fourrure brillait d'un éclat étrangement lumineux et argentée.

Sorry :

C’est quelque chose qu’elle déteste. Qu’elle a détesté dès la première seconde de leur premier échange lors de cette nuit illuminée par les neiges et la pleine lune symbolique. Brume Argentée savait brouiller les frontières, toutes, sans exceptions. Celles entre "amis" et "ennemis", celle entre "amitié" et "désirs". Celles qui séparent les clans depuis la nuit des temps. Vestale Céleste les franchissait toutes les unes après les autres pour elle. Et pourtant, elle les pensait infranchissables. Elle avait besoin de ces délimitations pour rester debout et droite, à l’abris de tous les dangers. Construire des murs qui la gardait protégée du monde extérieur, des autres. Intouchable, c'est ce qu'elle aurait aimé devenir. Elle savait n'avoir jamais réussis à l'être, mais ce soir elle l’était encore moins que jamais. Il n’avait suffi que de quelques paroles à la guerrière argentée pour faire tout basculer. Partir dans la nuit ce soir là était bien son choix, mais c’était un choix qui lui coûtait cher. Elle avait l’impression que l’effectuer revenait à s’arracher volontairement une partie d’elle-même, une partie de son identité, de ses valeurs. Oui, c’était pour cela que tant de colère transperçait dans sa voix, elle en voulait à Brume Argentée de la faire autant ployer, de réduire à néant tant de résolutions et d’idée ancrées.

A présent qu’elles se tiennent face à face, deux muses perdues dans le vent, figures d’un tableau perdu, Vestale Céleste ne sait absolument plus sur quelle patte danser. Elle n’a plus aucune indication. Qui est Brume Argentée pour elle, et qui est-elle pour Brume Argentée ? Les idées abstraites de « connaissances », « ennemies », « amie » et quelque chose d’autre encore, de bien plus fort et d’excitant, quelque chose qu’elle ne voulait définitivement pas nommer, tout cela se mélange dans son esprit, formant une grande question, et aucune réponse.

Peut-être était-ce cela. Brume Argentée était une idée, un mystère à résoudre. Beauté mystique qui, peu importe combien elle pouvait être proche de vous, resterait intouchable à jamais. Le silence qui s’étira entre elles deux, laissant entendre à Vestale Céleste le bruit retentissant de son propre cœur -résultat de la course, ou d’autre chose ? - la conforta encore dans cette idée.

Puis le silence cessa, et la luneuse revint à la réalité, et elle était bien là devant une Brume Argentée qui brillait de mille étoiles mais qui restait pourtant bien tangible, et elle parlait et bougeait et était bien trop concrète pour n’être qu’une idée abstraite. Oui, il suffisait de regarder son corps, son corps qui faisait frémir Vestale Céleste rien qu’à y jeter un coup d’œil, non vraiment elle n’avait rien d’une simple idée. Il fallait tout de même être stupide pour y penser. Si une chose était sûre également, c’est qu’elle, Vestale Céleste, était bien une traîtresse. Mais ça elle l’oublia peut-être pendant un instant parce que le peu de paroles qu’avait prononcées Brume Argentée avaient effacé tout le reste. Elle tenta tant bien que mal de cacher le trouble qui avait commencé à s’animer en elle mais fut bien contente que la riveraine se détourne un instant, histoire qu’elle ne soit pas vue avec les joues écarlates comme elles étaient sûrement à cet instant, vu la brûlure qu’elle ressentait.

Le silence, à nouveau, tandis qu’elle observe la guerrière adverse. Elle ne la quitte pas des yeux lorsque celle-ci se juche d’un bond magnifique sur le plus haut des cinq rocs, offrant son corps aux ombres de la nuit et à la pâle lumière divine de l’astre lunaire. Vestale Céleste se perdit un instant dans la contemplation de ce corps svelte et de ces muscles fins avant de détourner le regard par pudeur. Une petite voix dans sa tête lui fit tout de même remarquer que c’était un peu tard.

Elle se sentait à présent stupide, seule face à ces rochers en haut duquel se tenait la belle pêcheuse. Elle emprunta donc le même chemin qu’elle, se juchant avec difficulté sur le roc choisit par Brume Argentée. Eh oui, c’était l’inconvénient, ça manquait un peu de place, l’obligeant à se tenir bien plus proche d’elle qu’elle ne l’aurait souhaitée… Elle s’assit élégamment sur le peu de roche libre qu’il restait, enroulant sa queue autour de ses pattes pour tenter de maintenir une barrière, aussi risible soit-elle, entre les deux femelles. Ainsi, Bruma Argentée était omniprésente, et ses sens étaient assaillis d’elle, elle la frôlait à présent, et chacun de ses poils se hérissait au toucher de sa douce fourrure, et son odeur était partout, et si Vestale Céleste avait un jour imaginé que tous les chats de la rivière puaient, et bien par le clan des Étoiles, quelle erreur elle avait faite. Elle en oublierait presque qu’elle se tient sur un roc sacré, un roc réservé à ceux désigné par les étoiles même pour y siéger… Elle aimerait murmurer aux étoiles de la pardonner, de fermer les yeux et d’oublier, comme elle-même compte le faire le lendemain.

« En fait je… J’ai aussi cru que je ne viendrais pas. Mais ça ne… ne semblait pas poli de t’imagine toute seule ici alors j-j’ai… »

Elle s’arrête, soupire. Peut-être que non. Peut-être que ce n’est pas ainsi que les choses se sont passées. Peut-être qu’il faudrait qu’elle arrête de se mentir à elle-même, aussi.

« J’ai changé d’avis. J’avais envie de venir en fait, depuis le début je crois. »

Elle détourne le regard, tente de fuir les yeux de Brume Argentée. Elle sent la rougeur envahir ses joues à nouveaux, foutue timidité, est-ce qu’elle ne pourrait pas être un peu plus confiante un instant ? Elle tente de respirer avant de pouvoir se retourner et poser la question qui lui brûle les lèvres.

« Pourquoi sommes nous là ? Je veux dire, toi et moi... Pourquoi m’as-tu donné rendez-vous ici ? »

Hors rp:

BRUME ARGENTÉE
« A présent qu’elles se tiennent face à face, deux muses perdues dans le vent, figures d’un tableau perdu » - Vestale Céleste.

Brume Argentée observait cette belle inconnue au airs faussement gênés, qui se dandinait mal à l'aise, devant le regard éperdu de la déesse d'argent. Celle-ci ne cillait pas d'un poil, figée dans une posture à la fois imposante & gracieuse, tentant tant bien que mal de paraître forte & sûr d'elle, alors que son cœur tambouriné ardemment dans sa poitrine, menaçant de la faire perdre sa garde à chaque minutes supplémentaire, les mêmes questions incessantes tournoyaient dans son esprit rebelle : qu'est-ce que je fou ici ? je peux encore partir, elle ne le remarquerait pas, si ? et si je prétendais être attendue autre part ? Mais, aucun son ne sortait de sa bouche, et elle n'arrivait pas à se résoudre à laisser la belle blanche ici, dans sa beauté céleste, suspendu dans le temps.

La guerrière blanche brisa à son tour ce silence qui devenait de plus en plus embarrassant, alors que Brume Argentée commençait à croire que celle-ci avait perdu ou avaler sa langue.

« En fait je… J’ai aussi cru que je ne viendrais pas. Mais ça ne… ne semblait pas poli de t’imagine toute seule ici alors j-j’ai… »

La guerrière argentée releva un sourcil, offusquée, depuis quand elle avait besoin de quelqu'un pour veiller sur elle ? Et puis, l'autre paraissait si menue et frêle sous ces airs innocents que Brume Argentée doutait fortement qu'elle parviendrait à la protéger de quelconque dangers, elle esquissa un sourire narquois, elle se disait que c'était même plutôt le contraire qui lui plaisait tant, de s'imaginer venir à son secours et être son vaillant chevalier, au féminin. Puis l'autre ajouta des mots qui la perturba davantage ;

« J’ai changé d’avis. J’avais envie de venir en fait, depuis le début je crois. »

Depuis le début je crois, ça voulait dire quoi au juste ? Vestale Céleste rêvait-elle secrètement de Brume Argentée depuis des décennies, l'avait-elle remarquée alors qu'elle même était une créature si indifférente ? Ou alors parlait-elle de ce fameux soir où leurs regards s'étaient croisés pour la première fois ? Étais-ce à ce moment là que la guerrière blanche avait décidée qu'elle aimerait rencontrer, dans une soirée hasardeuse, dans la lumière lunaire & les embruns marin, la guerrière argentée ?

Elle n'eut pas de réaction sur le moment, se renfermant dans une expression froide & ténébreuse, alors qu'elle réfléchissait encore à un moyen de prendre la fuite, Brume Argentée ne voyait aucune issue, où peut-être ne le voulait-elle pas au fond d'elle ? Mais pour une raison qui lui était obscur, elle pressentait que quelque chose se passait, en elle, une appréhension envers l'attitude éperdue de son amie, ou alors envers son propre désir qui poussait tant son corps à se rapprocher d'elle avec frénésie ? Brume Argentée l'ignorait mais elle ne voyait rien de bon dans cette entrevue secrète. Puis, comme si l'inévitable devait se produire, Vestale Céleste ajouta, de sa voie suave et tenue ;

« Pourquoi sommes nous là ? Je veux dire, toi et moi... Pourquoi m’as-tu donné rendez-vous ici ? »

Et là, la dégringolade dans le cœur de Brume Argentée qui menaçait d'exploser, oui pourquoi, hein pourquoi ? Je ne te connais pas, et je t'invite à la tombée de la nuit pour me rejoindre dans la plus grande des discrétion à un endroit liés par le rassemblement et l'union de tout les clans, alors oui, pourquoi ? Pourtant, lorsque l'on connaît le personnage, ce n'est pas anodin pour une aguicheuse comme Brume Argentée, de retrouver d'autres chats, ennemis ou non, à la tombée de la nuit, mais elle ignorait pourquoi, elle savait que ce n'était pas juste une banal attirance qui avait poussée Brume Argentée à observait Vestale Céleste durant l'Assemblée entière, alors même qu'elle aimait jouer les intouchables.

Malgré tout, elle reprit ses esprit et sur un airs de défis, elle ajouta, d'une voix lourde de sens et de sous entendu.

« Comme si tu ne le savais pas, hein ? »

Elle se rapprocha inexorablement de la reine blanche, à une proximité si envahissante, que Brume Argentée avait balayé le peu d'espace vital correcte qui leurs restaient à chacune. Elle plongea ses iris vairons dans ceux tout aussi merveilleux de l'autre, et la défia d'oser dire le contraire de ce qu'elles pensaient toute les deux secrètement.

« Tu ne le vois donc pas ? .Elle marqua une pause et fit glisser la queue autours des flancs de l'autre, c'est un fait ma chère, nous nous plaisons mutuellement »

Et bim, le compte à rebours est lancée, laquelle des deux craquera en première ?

:

Spoiler:

“Kiss me on the mouth and set me free, Sing me like a choir
I can be the subject of your dreams, Your sickening desire
Don’t you wanna see a woman up close? A phoenix in the fire
Kiss me on the mouth and set me free; But please don’t bite”

https://www.youtube.com/watch?v=fLuWMOF6vOU

Si elle était totalement honnête, Vestale Céleste s’avouerait qu’elle n’a pas posé cette question sans arrière-pensée. Elle n’a jamais été de ceux qui agissent, des impulsifs qui foncent tête baissée. Non, Vestale est discrète, elle s’efface, observe, apprend. Tente de reproduire. Combien de fois a-t-elle observé un jeune guerrier et une jeune guerrière se tourner autour, se lancer des piques, des regards qui s’accrochent, des paroles murmurées au creux d’une oreille ? Des promesses, parfois des mensonges. Oui, elle connaît les coulisses de la drague, du flirt. Elle s’est imaginée à leur place, elle a longtemps caressé cette idée qui lentement s’est fait une place dans son cœur. Trouver l’amour, fonder une famille. Elle y a cru, presque. Songe Cristallin était là, tout proche. Elle le savait prêt à écouter son caprice, ses désirs. Puis elle s’était dérobée. Pourquoi ?

Aujourd’hui, tandis qu’elle pose sa question, les mots que lui a susurré à l’oreille au cours de la dernière Assemblée Brume Argentée résonnent toujours en elle. Simplement, elle ne comprend pas ce que ces mots faisaient là, lui étaient-ils bien destinés à elle ? Ça n’a aucun sens. C’est tout simplement impossible, alors pourquoi Brume Argentée prend -elle cet air fier, cet air de défi de celle qui connaît les règles du jeu, qui y a déjà joué, a toujours gagné.

La guerrière argentée se met en mouvement, s’avance, et Vestale Céleste se retrouve coincée, au moindre pas en arrière elle sait qu’elle sentira le vide sous ses pattes. Elle peut seulement reculer son buste le plus possible, détourner le regard pour ne plus ressentir la pression des yeux mi glace mi feu de Brume Argentée. Plus que jamais elle est consciente de son corps, comme il est vivant ce corps, comme il pulse, avec ce cœur qui bat plus vite et plus fort aujourd’hui que jamais encore. Elle frissonne tandis que la queue de la riveraine lui caresse les flancs, tandis que sa voix résonne si belle mais avec tant de force en elle. Elle n’a même pas le temps de réaliser dans quelle situation elle est, elle ne peut plus se contenir et recule dans un mouvement inconscient, dérape. La chute est courte, moins ridicule que le cri qui lui a échappé dans la surprise. Elle le sait à présent, la panique et la gêne se voient dans chacun de ses mouvements, chacune des expressions de son visage ahuri tandis qu’elle se relève péniblement et s’ébroue timidement. Tant pis, elle restera en bas. Finalement l’idée ne lui paraît pas si mauvaise. Brume Argentée est bien trop dangereuse pour qu’elle ne s’en approche trop à nouveau.

« Nous nous plaisons... ? »

Elle répète ces mots sans en comprendre réellement le sens, en essayant d'en saisir la subtilité, les mystères qui s’y cachent. Peut-être est-ce une vaste blague que veut lui jouer la guerrière adverse. Peut-être les riverains possèdent -ils tous un sens de l’humour douteux, en plus d’être aussi têtu que des pierres et fiers que des paons. Elle veut jouer avec elle ? Eh bien elle va la trouver. Vestale Céleste ne veut pas se montrer aussi inoffensive devant un membre de la rivière, elle n’est pas une apprentie qu’on intimide comme on veut. C’est une guerrière loyale à son clan, elle tente de s’en convaincre. Sa queue en panache bat l’air avec agacement tandis qu’elle relève des yeux déterminés, eux aussi à présent gagnés vers cette lueur de défi, vers les rocs, vers Brume Argentée tout là-haut. C’est beaucoup plus simple de s’exprimer à présent qu’il y a cette distance entre elles.

« Ça n’a rien de drôle. Tu devrais cesser tes enfantillages, retourner dans ton clan et moi dans le mien. Que crois tu faire en me donnant rendez-vous ici ? »

Son ton se fait accusateur. Elle la fusille du regard. Oui, si elle ne l’avait pas approchée pendant l’assemblée, si elle n’avait pas voulu jouer, si à présent elle ne l’avait pas provoquée… Vestale Céleste serait paisiblement en train de dormir, et la vie continuerait. Revigorée par cette idée, elle continue.

« Comme si nous pouvions nous plaire. Deux guerrières, et d’un clan adverse par-dessus tout. Mais sache que je suis loyale, jamais je ne trahirais la Lune. Sûrement pas pour quelqu’un comme… quelqu’un comme toi. »

Elle ricane presque à cette pensée, un rire qui est là pour lui donner du courage mais qui sonne presque faux à ses propres oreilles. C’est qu’elle n’a jamais pensé pouvoir aimer une autre guerrière, et lentement l’idée commence à s’infiltrer dans son esprit, dans son pelage comme un courant d’air, sous chacune des fibres de sa peau.

BRUME ARGENTÉE
« A présent qu’elles se tiennent face à face, deux muses perdues dans le vent, figures d’un tableau perdu » - Vestale Céleste.

Et alors que la déesse d'argent réduisait à poussière le peu de distance qui les séparaient, le destin en décida autrement, et dans un mouvement de recule et un cris de surprise, Vestale Céleste se dégagea de son emprise. Elle semblait perdu, comme un faon terrifié entouré d'une meute de loups. Brume Argentée faisait claquer ses crocs, et faisait danser ses hanches sous la lumière délicieuse de la lune, Reine du ciel, elle s'inclinait à sa grandeur. Ses yeux brillaient de malice, de désir, de défis.  Alors que la belle immaculée se retrouvait plus bas, Brume Argentée la dominait de toute sa hauteur, un air encore plus déterminée dans le regard, tu veux me fuir Vestale ? Très bien, tu ne sais pas à quoi tu joues. Et comme en réponse l'autre échappa un murmure, comme pour elle même.

« Nous nous plaisons... ? »

Elle semblait en douter ? Si elle en doutait, Brume Argentée, elle n'en avait aucun, elle était persuadée que les deux femelles avaient une attirance presque surnaturelle l'une pour l'autre, et si Vestale refusait à se l'admettre et préférait nier ce fait, la déesse d'argent se ferait à plaisir à le lui faire savoir. Deux atomes se rappellent sans cesse.

Les yeux vairons de la belle immaculée virèrent d'expression, et Brume Argentée aimait déjà ce qu'elle y voyait, serait-ce là, de la rage ? Ou alors de l'agacement ? Aurait-elle enfin réveiller le dragon qui somnolait en la jeune guerrière de la lune ? Elle semblait revigoré, réveillée. Sa queue fendit l'air dans un geste droit et furieux.

« Ça n’a rien de drôle. Tu devrais cesser tes enfantillages, retourner dans ton clan et moi dans le mien. Que crois tu faire en me donnant rendez-vous ici ? »

Cesser mes enfantillages ? Moi ? Mais jamais. Elle esquissa un sourire encore plus provocateur. Elle ne croyait rien, non, elle le savait. Et si Vestale Céleste refusait de voir la vérité en face, elle lui tirerait les vers du nez, quitte à la brusquer, quitte à la chambouler, il fallait que cette guerrière prude, douce & introvertie découvre la folie de la vie, l'allégresse et le fait de voler sans même avoir des ailes.

« Comme si nous pouvions nous plaire. Deux guerrières, et d’un clan adverse par-dessus tout. Mais sache que je suis loyale, jamais je ne trahirais la Lune. Sûrement pas pour quelqu’un comme… quelqu’un comme toi. »

Vestale Céleste riait jaune, et Brume Argentée hérissa sa fourrure, tant les paroles de  sa comparse la raviva. Deux guerrières qui se plaisant n'existeraient donc pas ? Et encore moins de deux clans adverses ? La déesse d'argent la fixa un moment sans rien dire, son visage se fit de marbre et ses yeux, de la foudre. Brume Argentée la fixait, toujours surélevé par rapport à elle. Puis elle éclata de rire à son tour, un rire sarcastique, un rire glacial.

« Tu es si naïve. »

Elle bondit à ses côtés et brisa la bulle de protection dans laquelle s'était réfugiée Vestale Céleste. Elle colla son poitrail contre le sien et sa tête se retrouva à quelques centimètres du sien.

« C'est ça Vestale Céleste, met toi en colère. Laisse cette émotion t'envahir et te guider. La colère est une émotion forte & elle te révélera ta vraie force, mais elle révèle également ta faiblesse... »

Oui parce que quelqu'un qui révèle tant de fureur, ne serait-ce pas quelqu'un qui se confronte à quelque chose qu'il ne veut pas savoir, Vestale Céleste refuserait-elle de voir quelque chose ? La guerrière argentée, fit glisser à nouveau sa queue derrière son dos, et la maintenait fermement. Elle articula ses mots, son souffle chaud se mêlant à celui plus saccadé de la guerrière blanche.

« Ce n'est pas un jeu enfantin, Vestale Céleste, et si tu refuses à voir ce que tu as sous le nez, alors c'est toi l'enfant. Seuls les adultes, ne refoulent pas leurs sentiments. »

Et sur ces mots, et se dégagea brusquement de la guerrière de la Lune, rejoignant à nouveau son perchoir un peu plus haut, elle l'observa longuement, plus aucune trace de défis ou de sarcasme sur son visage devenu impassible, ses pupilles étaient dilatés à leurs maximum révélant des yeux noirs et enragés. Elle s'allongea, ses deux pattes avant se chevauchant, ses griffes crissant sur la roche lisse. Le vent brossait sa fourrure à contre sens, la faisant s'illuminer davantage sous les rayons de la lune.
Elles étaient belles, là, toutes les deux, farouches, animés et félines.

« Tu es si naïve »

Vestale se contracta en entendant ces mots. Ce n’était pas la première fois qu’elle les entendait, mais elle ne comprenait pas pourquoi elle avait à le faire de la bouche de Brume Argentée. C’était plutôt sa mère qui le lui répétait. « Tu es trop naïve ma petite, sois prudente, tu vas te faire embarquer n’importe où à faire confiance à n’importe qui ainsi… » Voilà, c’était exactement ce qu’il s’était passé. Et c’est pour cela qu’elle refusait d’écouter d’avantage les inepties de la guerrière ennemie. Non, elle ne serait pas naïve. Elle se fit encore plus agressive dans son expression, brusquée par cette remarque. Tout son corps entier exultait son agacement pour celle qui lui faisait face, c’est à peine si un grognement menaçant ne s’élevait pas des profondeurs de sa gorge. Une limite avait été franchie. Depuis le début de cette entrevue elle était sur la défensive. Elle se faisait à présent agressive.

Agressivité qui se brisa comme un écran de verre lorsque Brume Argentée franchit d’un bond la distance qui séparait les deux félines. Elle pénétra dans son espace vital, se l’appropria. Elle se faisait conquérante, dominatrice. Leurs pelages se touchaient à présent, Vestale Céleste pouvait presque sentir la respiration de la guerrière argentée.

« C'est ça Vestale Céleste, met toi en colère. Laisse cette émotion t'envahir et te guider. La colère est une émotion forte & elle te révélera ta vraie force, mais elle révèle également ta faiblesse... »

Oui, elle était en colère. Elle sentait cette émotion envahir ses veines, bouillir sous son pelage. Elle la sentait jusqu’au bout de ses pattes, aux ramifications de ses griffes qu’elle avait par réflexe sorties sans en avoir conscience. Mais c’était la seule manifestation de sa colère à présent, car bien d’autres émotions prenaient le dessus. La confusion, la répulsion, la panique. Vestale Céleste ne s’était jamais sentie gagnante face à la confiance et à la grandeur des autres. Elle se sent prise au piège, fermement maintenue par Brume Argentée de tous côtés. Une proie devant un chasseur, une proie qui vient de perdre la partie et qui vit ses derniers instants. Elle ne devrait pas être ici à cet instant. Elle devrait être n’importe où sauf ici. C’est cela, la seule chose que réveille Brume Argentée chez elle à cet instant, c’est l’envie de fuir.

« Ce n'est pas un jeu enfantin, Vestale Céleste, et si tu refuses à voir ce que tu as sous le nez, alors c'est toi l'enfant. Seuls les adultes, ne refoulent pas leurs sentiments. »

La chaleur, le tourbillon d’adrénaline, leurs souffles qui se mélangent presque, le contact oppressant, tout cela laisse soudainement place à nouveau à la froideur obscure de la nuit. Vestale respire à nouveau, se rendant compte qu’elle avait presque retenu sa respiration durant les paroles de Brume Argentée.  Celle-ci s’est éloignée d’un bond, elle a rejoint ce perchoir interdit. Vestale a l’impression de se faire juger dans cette position, elle tout en bas et l’autre tout en haut. Comme si rien ne s’était passé elle s’allongea, dans la posture de celle qui sait déjà avoir tout gagné, qui pense la bataille terminée. Un rictus anime la bouche de la luneuse avant qu’elle ne prenne la parole sur un ton sarcastique.

« Je vois… Alors toi, tu penses déjà avoir tout vu, tout vécu, tout connaître. Moi je suis naïve, et toi tu es si sage. Si je suis une enfant, tu es une adulte. Et tu vois ce que tu as sous le nez, tu ne refoules pas tes sentiments... »

Elle n’aurait pas pensé réussir à faire franchir à ces mots la barrière de ses lèvres. Mais elle y est à présent, et il n’y a plus de retour en arrière possible.

« Alors laisse moi te poser une question. Que vois-tu à présent, Brume Argentée ? Parce que je ne vois rien d’autre qu’une guerrière qui se dit adulte, mais qui agit avec des caprices de chatons gâtés. Personne ne t’a jamais dit non ? …Tout cela parce que je ne veux pas te donner ce que tu veux. »

Elle s’arrête quelques instants, sa poitrine se soulevant et s’abaissant à un rythme soutenu alors qu’elle tente de reprendre son souffle. Elle n’est pas habituée à parler autant. Pas aussi vite. Et sûrement pas sur ce ton. Elle baisse ses yeux qu’elle maintenait jusqu’à présent levés vers la silhouette d’argent baignée de lumière, se calme.

« Je ne peux pas te donner ce que tu veux. »

Ces mots se sont échappés avant qu’elle ne puisse les retenir, son esprit déjà beaucoup trop emballé par ses tirades précédentes. Elle réalise trop tard leur portée, ce qu’ils pourraient signifier.

Spoiler:

BRUME ARGENTÉE
« A présent qu’elles se tiennent face à face, deux muses perdues dans le vent, figures d’un tableau perdu » - Vestale Céleste.

La déesse d'argent se tenait si prêt de la belle immaculée lorsque celle ci lui lâcha sur un ton acerbe et piqué de sarcasme ; « Je vois… Alors toi, tu penses déjà avoir tout vu, tout vécu, tout connaître. Moi je suis naïve, et toi tu es si sage. Si je suis une enfant, tu es une adulte. Et tu vois ce que tu as sous le nez, tu ne refoules pas tes sentiments... » Et la riveuse éclata d'un rire amer, avant de planter à nouveau son regard dans le sien. Elle ne cessait de la brusquer depuis le début de leur entrevue, elle savait pertinemment que ce n'était pas la bonne chose à faire avec la délicate guerrière de la lune, mais au fond d'elle, elle avait espoir de faire surgir de Vestale Céleste des sentiments qu'elle se refusait à admettre.

Le visage de Brume Argentée changea d'expression soudainement, elle eu un visage stoïque et sans aucune émotion, seuls ses iris qui brûlaient désireux, la trahissaient.

« Tous ce que je sais, c'est que je ne sais rien, hormis peut-être le fait, que tu me plais. »

Elle eut à nouveau un sourire provocateur sur cette petite phrase énigmatique et parée d'humour. Vestale Céleste, enchaîna sur un ton tout aussi piquant et méprisant.

« Alors laisse moi te poser une question. Que vois-tu à présent, Brume Argentée ? Parce que je ne vois rien d’autre qu’une guerrière qui se dit adulte, mais qui agit avec des caprices de chatons gâtés. Personne ne t’a jamais dit non ? …Tout cela parce que je ne veux pas te donner ce que tu veux. »

Brume Argentée se mit à sourire, espiègle, elle aimait le culot de la luneuse aux yeux vairons, et elle fronça à demi des sourcils, puis son visage s'adoucit lorsque la jeune chatte blanche murmura presque pour elle-même.

« Je ne peux pas te donner ce que tu veux. »

La guerrière d'argent resta un moment figée par les mots de son interlocutrice, perturbée, elle n'avait pas l'habitude de faire face à de la peine ou du désarroi venant d'autrui, et elle ne savait aucunement comment réagir face à ça, elle pensa à sa mère et ses étreintes réconfortantes, elle pensa à son père et son sourire chaleureux. Elle fit un pas en avant et observa un moment Vestale Céleste, cherchant à sonder ce qu'elle ressentait à ce moment précis, elle crut voir de la peur son ses iris vertes et bleus, et Brume Argentée déglutit, contrariée pour son amie. La peur c'est ce qui vous pousse à agir parfois, ou bien au contraire, elle vous terre dans vos pires craintes et vous laisses misérable face au monde qui vous entoure, comme écrasé par le poids de choses qui vous dépasse.

Elle fit un pas en avant et brisa à nouveau la distanciation ordinaire que doivent entretenir deux guerriers ennemis. Elle fit quelque chose de dangereux, au risque de se prendre un coup de griffes acérées, mais tant pis, son amie semblait  trop perdue à cet instant et Brume Argentée avait le sentiment profond que ce qu'elle faisait était juste et pour une fois qu'elle n'agissait pas par pur égoïsme, elle avait l'impression de bien faire. Maladroitement, elle entoura de sa queue douce et soyeuse l'autre guerrière, et au contact de son corps légèrement tremblant, Brume Argentée eu un choc de frissons qui lui parcourra l'échine brusquement, elle respira bruyamment lorsque sa tête se rapprocha de celle de son interlocutrice et des sensations étrange explosa au creux de son estomac, elle se crispa, puis se détendit, les griffes plantaient dans le sol comme prudence de son être qui réalisait qu'elle était blottit contre une Guerrière de la Lune qu'elle ne connaissait ni du Clan des Etoiles, ni des aïeux plus anciens, mais la chaleur de son corps à elle contre le sien lui procurait un bien fou, et elle se sentait apaisée comme lorsqu'elle avait était qu'un minuscule chaton amassait contre sa tendre mère.

« Tu n'as pas besoin de savoir ce que tu veux vraiment, parfois le seul moyen de le savoir, c'est de se laisser aller, et si, tu t'y autorisais pour une fois ? »

Ses iris sont presque implorants face à elle, et pour la première fois, Brume Argentée se sent désarçonnée face à sa camarade, sa voix est légèrement fébrile et son cœur bat la chamade, alors qu'elle est toujours blottit contre celle-ci.