The past beats inside me like a second heart [Valse]

Tu n’es pas quelqu’un qui croit véritablement au destin. Tu ne penses pas que le bonheur et le malheur arrivent par la volonté ou l’absence du Clan des Étoiles, comme c’est le cas pour beaucoup de tes camarades. Sinon, tu aurais certainement tourné le dos à vos ancêtres depuis longtemps déjà. Au contraire, tu as plutôt tendance à penser que le chemin que vous empruntez est le mélange d’une succession de décisions, ainsi que du hasard. Autrement dit, vous forgez votre destin en fonction des événements et de vos réactions face à ceux ci. Certaines choses sont toutefois un peu plus inexplicables. Par exemple, ta récente rencontre avec Merle Blanc. Après tant d’années, qui aurait cru qu’un tel hasard aurait pu vous mettre sur la même route à nouveau ? Tu ne te l’expliques pas. De toute manière, cela n’aurait pas d’importance. Tu trouves simplement que la vie a tendance à se montrer bien ironique, parfois. Et, revoir Merle Blanc t’a fait repenser à l’époque où vous vous côtoyiez. Tout était si… différent. Il ne te ressemble pas de tergiverser sur le passé, mais il faut dire que celui-ci ne cesse de vouloir te rattraper. Tellement de lunes se sont écoulées depuis l'époque où vous étiez apprenties. Vous avez connu tellement d'Assemblées, de batailles, de joies et de pertes. Vous n'avez pas la moitié de l'âge d'un ancien, et pourtant, c'est comme si vos vies avaient déjà été vécues toutes entières.

Il est également évident qu’après avoir revu tant de visages lors de ta cérémonie de meneuse, certains te sont un petit peu restés en tête. Cela t’a fait plaisir de les revoir. Certaines choses qui n’ont pas pu être dites en ce bas monde, l’ont été ce soir là. C’est une belle conclusion, qui te fait sourire en ce beau matin, alors que tu es assise près d’un des cours d’eau qui traverse le camp, le museau dirigé vers le ciel. Un nouveau chapitre a débuté. Tu es impatiente de découvrir ce qu’il vous réserve, sans pour autant oublier ce qui vous a mené jusqu’ici. Ou qui. Tu es bien conscience que qui vous êtes aujourd’hui, n’est ni plus ni moins le résultat de ce que vous avez fait, et de ce qui vous a été fait. Il n’y a qu’à regarder tes camarades, comme Ombre du Passé par exemple. Le pauvre n’arrive pas à échapper aux souvenirs et aux regrets qui le hantent, et cela l’a totalement métamorphosé. Tu aimerais qu’il n’y ait plus de malheurs pour vous alourdir le cœur, mais assurément, la vie et tout ce que vous faites perdrait un peu de son sens. Tout le monde a besoin d'un combat, qu'il soit contre autrui, ou contre soi-même. Le tien ? Tu supposes qu'il est contre un peu des deux, quotidiennement. Tu retiens un soupir, préférant de loin te focaliser sur la réalité plutôt que sur des ruminations. C’est là qu’un son émit dans ton dos attire ton attention. Tu tournes la tête, pour finalement apercevoir l’une de tes camarades. « Bonjour, Valse des Embruns. Tu es bien matinale. Que puis-je faire pour toi ? » Depuis que tu es devenue lieutenante, et désormais meneuse, tu as pris l'habitude qu'on vienne te voir pour une raison bien précise. Une demande, ou une question par exemple. Mais, de si bon matin, que peut bien vouloir ta camarade de longue date ?

Le doux sourire de ta camarade te signifie immédiatement que, quelque soit la raison de sa venue, ce n'est rien de grave. Tant mieux. Il est bien trop tôt, pour que l'inquiétude vienne ombrager le camp. Si seulement vous saviez que quelques jours plus tard, le camp serait ravagé par la colère de la nature, vous ne souririez pas aussi naïvement. Mais, ce sont des histoires pour plus tard, dont vous ne pouvez avoir connaissance en ce beau matin. Apparemment, c'est bel et bien le soleil, qui a tiré Valse des Embruns de son nid. Malgré tout, la guerrière semble joviale, bien loin de certains adultes, qui ne font que grogner dès lors qu'ils sont réveillés avant l'heure. Il faut dire que, Valse a toujours été une chatte plutôt positive. Il est bien plus courant de la voir avec un sourire sur les babines, que l'inverse. C'est ce qui fait que beaucoup de membres du clan l'apprécient. Tu peux le comprendre, même si elle et toi vous êtes éloignés au fil des lunes et des événements passés. Tu hausses légèrement un sourcil, en comprenant qu'elle t'a vu, le museau levé vers les cieux, et que c'est ce qui l'a incité à te rejoindre ici. Valse est observatrice, nul doute là dessus. Non pas que ça te gêne, mais il faut dire que tu n'es pas de ceux qui s'en remettent à la contemplation des étoiles, en temps normal. Croisant son regard alors qu'elle s'installe à côté de toi, tu finis par lui adresser un léger sourire. « Et bien, les vivants font une bien meilleure compagnie que nos ancêtres, tu ne trouves pas ? » L'arrivée de la chatte a eu le mérite de te ramener dans le présent. Et c'est un peu le double sens qui se cache dans tes paroles : il vaut mieux laisser le passé où il est, pour se concentrer sur le présent. Seuls tes camarades, seul le Clan de la Rivière comptent pour toi aujourd'hui. Tu ne comptes pas te reposer sur les conseils de chats dont les vies sont déjà terminées pour mener ta propre existence, non. Alors, ce regard dirigé vers les étoiles, il n'est le fruit que de bribes de nostalgie.

Le camp est encore désert, calme, paisible. Vous pouvez entendre le ruissèlement de l'eau, le chant matinal des oiseaux. En tendant l'oreille, vous pourriez même entendre certains de vos camarades ronfler. « J'ai toujours aimé l'aube. Sa fraicheur en toute saison, son calme, de quoi s'aérer l'esprit avant le début de la journée. » Tu aimes donc te lever avec le soleil, et le fais régulièrement. C'est une bonne manière pour toi de débuter la journée avec les idées claires. Même si, le clan va bien en ce moment. Les conflits et les disparitions semblent loin derrière vous, mais ce n'est pas une raison pour cesser de te mettre dans les meilleures conditions possibles. Une brise fraiche vient agréablement faire danser ta fourrure, alors que tes yeux se baladent sur l'eau qui défile devant vos pattes. « Je suppose que malgré tout, tu aurais préféré rester au creux de ton nid un peu plus longtemps ! » la taquines-tu ensuite, l'ayant rarement aperçue en dehors de la tanière des guerriers aussi tôt, à moins de se trouver dans la patrouille de l'aube. Il faut dire que vos journées sont longues et épuisantes, donc il ne s'agit pas d'une critique. Tu ne peux pas attendre de tous tes guerriers qu'ils copient tes propres habitudes.

Tes paroles arrachent un sourire à la guerrière, qui ne semble être ombragé par le souvenir de proches perdus. Pourtant, tout comme toi, Valse des Embruns a subit des pertes. Mais, elle sait certainement par expérience que vous n'avez pas d'autre choix que de l'accepter et d'avancer, si vous souhaitez vivre en paix avec vous-mêmes. Du réconfort, il est vrai que tu en as éprouvé lorsque tu as été rejoindre vos ancêtres pour recevoir tes vies. Mais, ce fut un sentiment plutôt inhabituel. Tu n'es pas certaine de trouver l'idée du Clan des Étoiles très consolatrice de manière générale. Cela te rappelle juste que beaucoup de proches ont été perdus. Et puis, à défaut de trouver ça particulièrement amusant, tu es d'accord avec l'autre chatte pour dire que les vivants sont bien plus importants. Au moins, eux, vous pouvez encore les aider, encore les protéger ou les diriger. Le Clan des Étoiles vous guide lorsqu'il le désire, mais tu préfères de loin tracer ton propre chemin. Un souffle amusé t'échappe lorsque Valse des Embruns qualifie vos ancêtres d'un petit peu ennuyeux. Tu supposes que ce n'est pas entièrement faux, même si un guérisseur ne serait pas d'accord avec vous. Ils appartiennent au passé, et seul l'avenir doit vous intéresser. « Ne le dis pas trop fort, ils pourraient t'entendre. » souris-tu alors, sachant que ça n'aurait de toute manière pas de véritable conséquence. Tu n'es pas aussi à cheval sur tout ça que d'autres. Tu aurais plutôt tendance à te fier au Code du Guerrier lorsque le moment s'y prêtera, plutôt que de manière systématique. Mais ça, ce n'est pas le sujet du jour. Et quel est-il, d'ailleurs ? La conversation semble si légère auprès de ta camarade. Cela fait longtemps que tu n'as pas été face à un enjeux dans un échange avec autrui. Il y a toujours un défi, toujours une conséquence derrière, mais pas cette fois.

Tu mentionnes alors tout aussi simplement l'aube et ses bienfaits, ainsi que l'évidence que ta camarade ne l'apprécie pas autant que toi. Cela arrache un rire à la concernée, qui ne tarde pas à confirmer tes paroles. Il est vrai que la fraicheur matinale peut être agressive à l'approche de la mauvaise saison, mais ça ne t'a jamais freiné dans tes habitudes. Tu souris légèrement en la voyant frissonner pour illustrer ses paroles, avant de répondre. « Il est vrai que la chaleur a ses avantages. Et je crois que la plupart de nos camarades seraient plutôt d'accord avec toi. » C'est d'ailleurs bien caractéristique de votre clan ça, de se prélasser au soleil après une bonne partie de pêche. Et cela t'arrive parfois aussi, lorsque tu en as le temps. Rien de tel pour regagner quelques forces en pleine journée. Sa proposition est aimable, mais tu es quand même plutôt certaine de déjà connaître les meilleures zones du camp. Après tout, il n'y a qu'à observer vos camarades, ou Valse des Embruns elle-même, pour le deviner. « Je veux bien te croire. Alors, il me suffira de te chercher du regard pour savoir quels rochers utiliser. » réponds-tu alors tout en hochant négativement la tête. L'air n'est de toute façon pas suffisamment chaud pour le moment, pour faire une telle démonstration. Et puis, en début de journée, tu n'es pas tellement d'humeur à t'installer sur les rochers. « Mais je suis sûre que certains de nos camarades apprécieraient ta compagnie. Ou tout du moins, cela leur ferait du bien. Ta bonne humeur aurait de quoi redonner le sourire à ceux qui l'ont perdu. » Et oui, tu as bien remarqué que certains riveux semblent cacher autant de tristesse que de rancoeur au fond d'eux. Peut-être que t'en fais partie, mais au moins, tu n'as pas à craindre tes propres réactions, contrairement aux leurs. Peut-être que Valse des Embruns a un avis sur la question ? Ombre du Passé... Gouffre du Soleil, il n'y a qu'à les regarder pour savoir que rien ne va pour eux.

Il peut paraître osé de vous moquer ouvertement de vos ancêtres, mais il n’y a au final qu’un fond d’humour dans vos paroles. Tu esquisses un nouveau sourire en entendant ta camarade parler de vengeance des Étoiles. Heureusement, ces choses là n’arrivent généralement pas. Vous n’êtes pas aussi attachées aux règles et au jugement du Clan des Étoiles que d’autres, comme Merle Blanc par exemple. Tu refuses de laisser vos vies être dictées par l’esprit de chats disparus. De croire que tous les malheurs, et tous les bonheurs viennent également d’eux. La vie est simplement composée de tout cela et vous ne pouvez que l’accepter. Au moins, c’est un état d’esprit que Valse et toi semblez partager. La discussion se poursuit, passant du froid de l’aube à la chaleur des rochers ensoleillés, tout cela dans un calme agréable. Cet apaisement te rappellerait presque ta vie avant d’être meneuse, ou plutôt avant d’être lieutenante. Il n’y a pas vraiment eu de répit depuis. Mais en un sens, tu sais que tu trouverais la vie bien ennuyeuse s'il ne se passait jamais rien. C'est assez contradictoire, tu le sais, de vouloir le bien du clan, sans devoir faire face à une routine. L'ennui est pourtant bien moins dangereux qu'une terrible bataille.

Mais, les inquiétudes que tu nourris aujourd'hui ne te concernent pas, et tu te dis que la rouquine peut être une bonne oreille pour écouter tes doutes. Un clan ne peut bien fonctionner qu’à l’aide de ses membres. Et si ceux-ci sont eux-mêmes envahis par des démons qu’ils ne peuvent combattre, cela pourrait un jour vous faire défaut. Et, la vie semble continuellement vous donner de nombreuses raisons d’être hantés. Par le passé, par les proches disparus, par les batailles. Bien sûr, tu ne peux forcer personne à changer ou à aller mieux, tu l’as bien vu en discutant avec Ombre du Passé, mais des choses peuvent assurément être essayées. Des esprits positifs comme celui de Valse des Embruns représentent en quelques sortes des moteurs, peut être pas des exemples à suivre mais de bonnes sources d’inspiration pour garder la tête haute en toute situation. Un espoir auquel se raccrocher dans l’idée que, quoi qu’il arrive, il est possible de le surmonter.

La réponse de la guerrière semble incertaine, et tu comprends qu’elle-même essaie déjà de redonner le sourire à ses camarades. Cela ne t’étonne pas en réalité, car ça lui ressemble bien. Ce qui t’interpelle plus en revanche, est la manière dont elle semble penser que certains membres du clan ne peuvent plus être aidés.  « Dans les ténèbres… » répètes-tu alors, trouvant le terme plutôt fort. Mais, tu sais aussi que Valse ne l’aurait pas employé sans en mesurer le sens.  « J’espérais que tu serais au moins plus optimiste que moi à ce sujet. » Mais tu ne peux pas la blâmer. Au fond, elle a sans doute raison.  « Il serait toutefois naïf de te donner tord, je le crains. Peut être qu’à défaut de les en sortir, nous pourrions au moins les aider à ne pas s’y enfoncer encore plus ? » Peut être que c’est de ça, dont vous devriez vous contenter. Le Clan de la Rivière fonctionne et il ne faut peut être pas en demander plus. Aucun nom n’a été cité, mais tu supposes qu’il est plutôt clair que cela concerne plusieurs de vos camarades. Tout le monde peut voir leur mal être, même s’ils s’efforcent de la cacher.  « Bien que, je ne saurais comment. Chacun est différent dans sa façon de vivre les choses.  » Si vous étiez tous pareils, si toutes les solutions s'appliquaient à tout le monde, alors la solution serait vite trouvée. Mais certains coeurs sont plus froids ou plus faibles que les autres. Certains esprits sont plus fermés, plus tournés vers le passé, encore plus que le tien.