end of secrets (Coup de Foudre)

Certains rêves laissaient à Coup de Foudre un goût amer.

Il se voyait, parcourir la forêt du Clan du Tonnerre aux côtés de ses parents, vagues silhouettes presque imaginaires. Il ne les entend pas, leurs voix sont indéchiffrables. Leurs bouches bougent, sans qu’aucun son n’en sortent. Il n’a que des noms à mettre sur ces visages flous. Leurs histoires ne sont contées que par quelques âmes généreuses, mais rien ne l’assure que ce sont des vérités absolues. Il se doit d’inventer des vies, à des inconnus. Des personnes qui se sont contentés de le mettre au monde, sans rien lui accorder de plus. Alors, il feignait l’indifférence face à tous, pour ne pas paraître faible, pour qu’on ne puisse pas creuser cette faille en lui. Il s’était forgé seul, avait grandi seul. Son autonomie juvénile n’avait donc surpris personne... Et peut-être qu’au fond il aurait voulu que ça surprenne. Peut-être qu’il voulait qu’on lui accorde cette attention qu’il méritait. Ça n’avait jamais été facile d’être le fils de deux exilés, même volontaires. Ils restaient des traîtres, aux yeux de certains. Et beaucoup leur en voulaient. Appel du Loup le premier, qui nourrissait une certaine amertume pour son ancien mentor, Cavalier Fantôme, qui s’était évaporé dans la nature, en ne laissant qu’un tout jeune chaton à peine né comme seul trace de son existence.

Une vive douleur traversa son corps, comme un choc électrique, sortant Coup de Foudre de ses songes. Papillonnant des yeux, il n’entendit que vaguement les instructions de Feuille d’Automne, encore un peu étourdi par son sommeil. Le bicolore poussa un grognement râleur comme seul signe d’approbation et se réveilla doucement, passant sa patte sur son oreille pour faire passer la douleur. Il se mit à faire du tri dans son pelage, à l’instar de son esprit, rangeant les pensées de la veille dans un coin. Il était sincèrement heureux de savoir qu’Ombre des Chouettes ne subirait pas le courroux d’Étoile Embrasée... Il avait pris le temps de réfléchir à ce qui s’était produit. Il ne regrettait aucun de ses mots, il ne s’était même pas questionné dessus, à vrai dire. Il préférait nier ce que lui hurlait son cœur, plutôt que d’affronter la vérité se cachant derrière les propos qu’il avait tenu. L’ardeur dont il avait fait preuve en avait choqué plus d’un et à vrai dire il n’avait probablement pas laissé son meneur si stoïque qu’il avait bien voulu le faire croire.

Il sortit de l’antre des guerriers, traînant des pattes malgré les avertissements de la femelle qui l’attendait un peu plus loin. Il accueilli son ronronnement joyeux en lui offrant un léger sourire, faisant mine d’être outré de son petit coup de patte sur son poitrail. Coup de Foudre s’étira un peu, baillant avec désinvolture en haussant mollement les épaules. Il n’était pas spécialement du matin, le matou... Il mena tout de même la marche, traversant le tunnel de lichen menant à la forêt. Une fois à l’extérieur, il se posta à ses côtés, faisant mine de ne pas avoir entendu la seconde partie de sa phrase.



Il la poussa doucement d’un coup d’épaule et continua à marcher, les dirigeant vers le Lac de la Source. Il se doutait de ce dont elle voulait lui parler, mais il préférait jouer l’ignorant, l’innocent. Il avait dépassé sa colère d’hier, il préférait ne pas y penser à nouveau. Après tout, il savait plus ou moins d’où cela provenait... Alors, il ne valait mieux pas s’y attarder. Il slaloma entre quelques arbres, accélérant la cadence. Il ralenti seulement lorsqu’il aperçut, entre les arbres, le lac qui ne devrait plus tarder à geler avec le temps qu’il faisait. Il s’assied face à l’étendue d’eau, reprenant son souffle. Sans jeter un regard à Feuille d’Automne, il déclara :



Il lui fit un clin d’œil, pas véritablement sérieux. Il aimait séduire, mais le romantisme était loin d’être sa façon de faire. Le rouquin se pencha en avant pour laper l’eau, se désaltérant un peu, comme s’il se doutait qu’il allait avoir besoin de salive pour se justifier.


Il lui lança un regard provocateur, affichant un large sourire pour lui montrer que c’était de l’humour. Vache, mais de l’humour quand même. Il ne le pensait pas. Coup de Foudre aimait bien Feuille d’Automne. Il semblerait qu’il ait des penchants pour les caractères forts, comme avec Appel du Loup qui est son ami le plus proche. Il se sentait jeune à côté d’eux, mais il s’en fichait bien. Au moins, eux, étaient cools. Il se lécha les pattes et lui fit signe de se coucher à ses côtés.