I ain't got no brains in my heart - ft. Nuage de l'Éphémère

I ain't got no brains in my heart.
Nuage de l'Éphémère & Nuage de Lune
Lune 1210


Nuage de Lune marchait sous la pluie d’un pas décidé. Rarement les traits de son visage avaient laissé paraître autant de détermination. Elle avait passé les derniers jours à réfléchir, n’en n’ayant presque pas dormi. Elle en avait parlé à Sol’. Elle en avait parlé au club. La conclusion qui s’imposait était claire comme de l’eau de roche.

Elle se dirigeait vers la rivière, le cœur léger et le pas vif. Une énergie débordante l’animait malgré sa fourrure trempée. Son frère lui avait indiqué qu’il l’avait vu partir dans cette direction. Nuage de l’Éphémère, le principal sujet de ses insomnies. Elle répétait en boucle les mots qu’elle allait choisir pour lui avouer ses sentiments.

Oui, elle avait encore un peu de mal à le réaliser elle-même mais il n’y avait pas de place au doute. Elle était amoureuse de la jolie femelle. Elle repensait, frissonnante, à leurs longs échanges de regards, à leurs fous rires et leurs longues discussions où des heures entières ne semblaient que quelques minutes, aux décharges foudroyant son cœur lorsque Fée prononçait son nom …

« Bonjour Fée ! » … non, mais non ! C’est beaucoup trop formel. Voyons plutôt … « Salut Fée ! Comment ça va ? » … pfff mais non, pas de question. Sinon, elle va me répondre et là, je serai déstabilisée par sa voix d’ange et son sourire. « Je t’aime. » Oui … ou non, trop direct. Haha, oui, vraiment trop direct. N’empêche, imagine sa tête si je lui annonçais ça de but en blanc. Je sais comment je veux lui annoncer. « Salut Fée ! … Attends, ne parle pas, laisse-moi parler en première. Je .. Je pense que je ne suis pas la seule à avoir ressenti cette connexion qui nous unit. Alors, aujourd’hui, je prends mon courage à pleine pattes pour te dire que je pense avoir des sentiments pour toi. Oui, je crois bien que je t’aime. Plus que comme une simple amie. Je comprendrai, bien sûr, que cela ne soit pas réciproque … Mais voilà, je tenais à ce que tu le saches. C’est important pour moi.  » Oui, voilà, parfait. C’est ce qu’il faut que je dise. Sobre, efficace. Pas trop percutant mais clair et surtout honnête. Ça ne tourne pas trop autour du pot et en même temps c’est amené en douceur. Haha, serais-je un genre de génie des sentiments ? C’est fort possible, et d’ailleurs …

Elle s’arrêta net. Nuage de l’Éphémère se tenait juste devant elle, sur la rive. Qu’elle était belle ! Dans ses grands yeux ambrés dansaient les reflets des flots de la rivière agités par la pluie drue. Son pelage tricolore frémissait sous le vent, elle se tenait avec tant de grâce, tant de prestance. Lune n’avait aucune idée de ce qu’elle faisait ici, surtout par ce temps, mais au fond, elle ne tenait même pas à le savoir. Elle était juste heureuse de la voir. Elle voulait lui dire qu’elle l’aimait.

« S-Salut .. Fée ! Haha, c’est marrant comme surnom, hein ? » Euh, qu’est-ce qu'il me prend ? « Il fait beau, n’est-ce pas ? » Mais enfin, il pleut, qu’est-ce que je raconte ?! « Je …. Je chassais dans le coin, puis je t’ai vue, donc je me suis dit que j’allais rendre visite à mon amie ! On est tellement amies toi et moi haha .. C’est comme si on était sœurs non ? » MAIS QU’EST-CE QUI TOURNE PAS ROND CHEZ MOI ?!!

Nerveuse et morte de honte, Lune jeta un coup d'œil aux environs, comme si de rien n’était, prenant bien soin de ne pas croiser le regard envoûtant de sa camarade.

Ses pas s'enfonçaient hasardeusement dans le sol humide, une pluie légère battait son plein sur la vallée, et les gouttes ruisselaient sur sa fourrure épaisse, son esprit fusait de pensées étranges, depuis peu Nuage de l'Ephémère se sentait confuse, non à cause de ses tracas habituels de choix de vie sur devenir Guerrière ou Guérisseuse, mais parce que depuis qu'elle avait eu cette fameuse après-midi en compagnie des autres apprentis, Nuage de Fraise, Nuage du Soleil & Nuage de Lune, ils n'avaient cessés de se rapprocher. Et si la jeune calicot avait l'habitude maintenant de passer beaucoup de temps en compagnie de l'apprenti roux parce qu'ils partageaient le même mentor, elle appréciait particulièrement le temps passé en compagnie de la jeune femelle ébène, Nuage de Lune. Elle n'arrêtait pas de penser à sa fourrure soyeuse couleur de la nuit, ses yeux pâles et brillants qui avaient un effet apaisant sur son âme, ou encore son rire cristallin qui faisait écho dans son esprit pendant des heures après. Elle se disait que c'était étrange, la façon dont elle aimait Nuage de Lune, n'étais pas la même façon dont elle aimait Nuage du Soleil ou encore Nuage de Fraise, ce qu'elle ressentait pour eux était platonique, amicale, mais lorsqu'elle pensait au visage de la petite apprentie noire, son cœur tambourinait dans sa poitrine.

Elle ne savait pas ce que cela signifiait, et elle redoutait un peu la réponse. Et si elle éprouvait des sentiments amoureux pour la petite chatte couleur de jais ? Elle sentit ses joues se pourpraient de honte, au vu de sa situation actuelle, elle avait bien d'autres problèmes, ajouter à cela un amour qui pourrait se relever impossible si elle changeait de voie lui semblait dangereux. Elle tenta d'ignorer ses sentiments et se concentra sur la route, peu à peu, le bruit régulier des remous de l'eau vinrent chanter une douce mélodie à ses oreilles, elle observait les rebords de la Rivière, à la recherche de menthe aquatique, malgré tout, le temps était encore trop frais pour que les plantes à l'odeur sucré pointent le bout de leur feuilles. Alors, elle s'allongea près du bord, malgré l'averse, et se laissa aller à la contemplation des douces vaguelettes qui se battaient contre les gouttes de pluie qui s'engouffraient en son lit et venaient lécher la terre meuble, laissant une fine couche d'écume qui s'évaporait aussi vite qu'elle arrivait.

Bientôt un bruit l'alerta, et Fée se redressa, aux aguets, quelqu'un approchait et elle plissa des yeux vers l'obscurité de la forêt. Une fine silhouette émergea de l'ombre des arbres, et ses yeux s'écarquillèrent devant la nouvelle venue, Nuage de Lune ! Oh non, j'étais entrain d'essayer de t'oublier et voilà que tu te pointes, la femelle calicot resta bouche-bée devant sa beauté délicate, elle se rendait compte à quel point elle trouvait la jeune femelle noire sublime, ses yeux papillonnèrent et elle essaya de reprendre son calme.

Une expression étrange s'affichait sur le visage de Nuage de Lune, elle semblait pensive, presque soucieuse et Fée s'inquiétait, était-il arrivé quelque chose à la jeune apprentie ? Elle fronça des sourcils, personne n'aurait pu lui faire de mal, Lune était bien trop gentille & douce, qui donc, oserait s'attaquer à une créature si gracile ? Puis, la petite voix de la novice ébène vint perturber le calme qui régnait entre elles à cet instant, et elle parla si vite, que Fée se dit qu'elle devait peut-être être malade. Elle réfléchissait aux remèdes adéquat en cas de maux de ventre ou de tête pendant que l'apprentie parlait, ou peut-être avait-elle une épine plantée dans la patte ? Au quel cas, elle serait capable de la lui enlever sans difficulté.

« S-Salut .. Fée ! Haha, c’est marrant comme surnom, hein ? Il fait beau, n’est-ce pas ?  Je …. Je chassais dans le coin, puis je t’ai vue, donc je me suis dit que j’allais rendre visite à mon amie ! On est tellement amies toi et moi haha .. C’est comme si on était sœurs non ? »

Nuage de l'Ephémère fit une grimace très expressive, à moitié choquée, amusée, et un peu déçu. Elle l'a considérait comme une sœur ? Hm, ce n'est pas comme ça que je concevais notre relation, songea-t-elle. Pourtant, la voix de Lune était tout sauf naturel, comme ci, elle forçait la conversation et qu'elle souhaite dire autre chose. De plus, il ne faisait pas beau du tout, bref, Nuage de l'Ephémère trouvait cette situation plutôt malaisante et incongru, pourquoi Nuage de Lune se comportait aussi bizarrement ? Elle décida de répondre à son tour, un peu contrariée, sa voix se fit plus sèche.

« Tu nous considères comme des sœurs toi ? Elle avait un ton quelque peu dédaigneux, pas moi. On est de très bonne amies oui, mais je ne dirais pas que je ressens pour toi ce que je peux ressentir pour mon propre frère. Elle mentionnait peu son frère, Nuage de Criquets et elle s'était un peu éloignés avec le temps, même si elle l'aimait toujours énormément. Elle réalisa qu'elle avait été un peu cassante, et se radoucit, après tout, si la jeune apprentie ébène ne ressentait pas les mêmes choses, elle ne pouvait pas lui en vouloir. Elle se rapprocha, d'un peu trop près, à tel point que leurs deux souffles se mélangèrent et formèrent de la vapeur sous l'averse, tu as une brindille là, elle la retira, voilà c'est mieux !  »

Son cœur battit la chamade lorsqu'elle se rendit compte de la proximité qu'elle avait franchit en se rapprochant, puis recula précipitamment, un peu mal à l'aise, elle émit un petit rire maladroit, tout en fuyant le regard bleuté de son amie.

« Tu.. Tu voulais me dire autre chose, Nuage de Lune ? »

Elle sentait que son amie n'avait pas fait tout ce chemin juste pour lui dire ces choses incohérentes, peut-être qu'elle était venue lui dire qu'elle avait découvert son secret et qu'elle voulait qu'elles en discutent, elle se sentirait rassurée de pouvoir en parler à quelqu'un, elle se sentait si seule parfois à devoir mentir à tout le monde, et si la femelle l'avait surprise à partir en douce du camp, peut-être avait-elle compris que ce n'était pas juste des insomnies mais autre chose ? Si Nuage de Lune lui demandait, elle dévoilerait tout, parce qu'elle n'en pouvait plus de mentir en la regardant dans les yeux, elle ne pourrait jamais lui dire la vérité d'elle même, mais si la petite chatte avait compris, alors elle lui dirait. De plus, de ce qu'elle avait crut comprendre, Nuage de Lune l'aimait comme une sœur, alors elle pouvait se permettre d'oublier ses propres sentiments et de la traiter comme l'amie chère qu'elle représentait à ses yeux, sans plus d'ambigüité.

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Nuage de l'Éphémère & Nuage de Lune
Lune 1210


Mais pourquoi je me toilette sous la pluie ? J’en ai d’autres des démonstrations d’idiotie à faire ? Bravo Lune, t’as bien choisi ton moment pour te ridiculiser …

Nuage de Lune ne comprenait pas ce qui lui arrivait. En fait, elle ne se reconnaissait pas. Tous ces sentiments qui venaient lui comprimer la poitrine lui étaient inconnus. En temps normal elle était cette novice timide, réservée, qui ne parlait pas beaucoup et se cachait derrière Nuage du Soleil lorsqu’il y avait trop de monde. Parfois maladroite mais toujours d’un grand calme et d’un sérieux à toute épreuve, elle mettait beaucoup de douceur dans tous ses faits et gestes. Et pourtant, à cet instant, alors qu’elle croisait le regard électrisant de Nuage de l’Éphémère, elle ressentait de la colère. Une colère étrange, pleine de passion. L’apprentie noire comme la nuit en voulait à sa camarade de déclencher tout cela en elle. C’était de sa faute si Lune était incapable de se reconnaître, de contrôler ses faits et gestes et de comprendre ce qu’elle ressentait. Enfin, elle était surtout en colère contre elle-même, pas la peine d'essayer de se le cacher … Maladroite, ça elle l’avait toujours été, mais jamais cela ne lui avait autant fait défaut. Pourquoi était-elle incapable de s’exprimer et d’agir normalement ?

« Tu nous considères comme des sœurs toi ? Pas moi. On est de très bonnes amies oui, mais je ne dirais pas que je ressens pour toi ce que je peux ressentir pour mon propre frère. »

Lune sentit dans le ton de Fée qu’elle l’avait blessée. La colère qu’elle ressentait à son propre égard s’intensifia. Elle était venue jusqu’ici pour lui avouer ses sentiments naissants, et tout ce qu’elle avait réussi à faire, c’était lui faire du mal. Au moins, elle avait dit qu’elles étaient de très bonnes amies. Peut-être qu’après tout, Lune avait tort d’espérer que Fée l’aime en retour. Cela avait toujours été une possibilité, mais pour une raison qui lui échappait, l’apprentie ébène était persuadée que son amie avait aussi des sentiments pour elle. C’était cette conviction qui lui avait donné le courage nécessaire pour venir la trouver aujourd’hui. Un grand froid la saisit, l'immobilisant. Son courage s'évanouissait, ses espoirs s'effondraient.

La calico s’approcha alors, un peu trop près pour que Lune ne soit pas déstabilisée. Elle lui retira une brindille accrochée dans son pelage, puis, visiblement mal à l’aise, recula. Le cœur de Lune battait à lui en faire mal. Son souffle était court, saccadé. Son pelage humide lui collait à la peau, elle gardait ses yeux à demi-clos pour se protéger des gouttes de pluie qui tombaient avec intensité.

« Tu.. Tu voulais me dire autre chose, Nuage de Lune ? »

Je t’aime. Je veux passer ma vie à tes côtés, te voir sourire, t’entendre rire, sentir la chaleur de nos fourrures côtes-à-côtes. Je veux qu’on aille chasser ensemble, je veux qu’on dorme ensemble. Je veux te protéger. Je veux te faire réaliser à quel point tu es spéciale à mes yeux.

… Mais elle avait tout gâché, n’est-ce pas ? Ne venait-elle pas de lui dire qu’elle la considérait comme sa sœur ? Les épaules droites mais les oreilles basses, elle observa un instant la pluie venant troubler le cours de la rivière.

« Euh, non pas vraiment. On devrait peut-être s’abriter, tu ne crois pas ? On risque de tomber malade sinon. »

Lune se détourna alors, faisant mine de chercher un abri, seulement elle était trop bouleversée pour se concentrer sur quoi que ce soit. Elle marcha d’un pas hésitant, ignorant si Fée la suivait ou non, faisant un effort douloureux pour retenir les larmes qui embuaient ses yeux pâles.

Bientôt alors qu'elle battait déjà son plein, l'averse s'intensifia, et les gouttes s'écrasaient en grosses gouttes sur les deux apprenties désormais trempée, comme figée par leurs sentiments mutuels tout en étant incapable de bouger, il leur fallu un moment avant de s'apercevoir de la pluie qui s'égayait sous leurs nez. L'une d'entre elle, réalisant l'urgence de la situation, fut prise d'un éclair de génie et balbutia un peu mal à l'aise ;


« Euh, non pas vraiment. On devrait peut-être s’abriter, tu ne crois pas ? On risque de tomber malade sinon. »

Aussitôt, Nuage de l'Ephémère sortit de sa torpeur et sursauta, sa vision flou par le torrent qui l'aveuglait presque, elle ne parvenait pas à identifier les émotions de sa camarade correctement et elle renifla, timidement tout en se mouvant lentement. Bientôt, les deux apprenties furent envahis par le besoin de se mettre à l'abris, et maladroitement, elles se serrèrent dans un endroit étroit, entre deux buissons éparses, essayant de se battre, en vain, contre la pluie battante. Fée fit d'abord des courbettes pour éviter soigneusement le regard gris pâle de son amie, elle mourrait d'envie de lui dire la vérité mais ses émotions se contre disaient sans cesse et elle ne parvenait plus à réfléchir correctement. Tantôt, elle voulait lui avouer que son destin n'était pas celui d'une guerrière, et tantôt, elle se plongeait dans ses yeux merveilleux aux couleurs de ses rêves les plus fou, et l'amour qui brûlait en elle, lui piquait la fourrure comme mille fourmilières en furie. Peu importe le choix qu'elle ferait, son cœur se briserait et c'était à cet instant, qu'elle haïssait les étoiles le plus, non pas lorsqu'ils émettaient des prophéties incohérentes et mystérieuses, mais plus lorsqu'elles la confrontait à son destin qu'elle jugeait tant cruel pour toutes les émotions qu'elle avait dans le cœur. Oh Nuage de Lune, si tu savais, si tu savais comme à ce moment, je meurs d'envie de me blottir dans ta fourrure chaude, aux effluves de pins mêlé aux mucus des fleurs, doux parfum laissé par tes escapades en forêt, persistant même après une journée de pluie torrentielle qui n'avait pas suffit à effacer l'identité même de ta personne, douce comme les pétales de fleurs, puissante et subtile comme les épines des pins.

Enivrée par ses souvenirs des moments du partage, réchauffée par les rayons chaleureux du soleil, envoûtée par son rire cristallin qui résonnait à ses oreilles comme la mélodie d'un geai au printemps, Fée se laissa aller à la contemplation de ses deux iris limpide comme l'eau d'un ruisseau, et pendant qu'elle se perdait dans son regard, elle sentait une chaleur l'envahir, barrière au froid glaçant des gouttes de pluie.


« T'es yeux ils sont... Incroyable Lune. Un sourire béat se dessinait sur ses babines et elle avait l'impression de vivre un rêve éveillé. J'ai l'impression d'y voir deux joyaux de cristal. Je.. Tu es si belle. »

Puis, comme réalisant à l'instant ses propos, Fée se recula de quelques pas en enfouissant son museau dans ses pattes. Elle avait si honte et si chaud en même temps, que lui arrivait-il au juste ? Elle savait qu'elle ressentait des choses très forte pour la féline de jais, mais jamais, elle n'avait sentit son coeur battre aussi fort dans sa poitrine.


« Pardon.. J'ai... Heu, était super intrusive, je voulais pas être bizarre, mais c'est la vérité, j'aime beaucoup tes yeux, les miens sont plus ordinaire et puis j'ai plus souvent l'occasion d'admirer les tiens, que les miens aussi ahah.. »

Mais qu'est-ce qu'elle racontait au juste ? Se rendant compte de ses propos incohérents, Nuage de l'Ephémère eut envie de jeter des noix sur le crâne, se sentant affreusement stupide, elle tenta d'esquisser un sourire un peu naïf, "j'ai plus souvent l'occasion d'admirer les tiens, que les miens nieunieunieu" et puis quoi encore ? Tu veux pas me créer un reflet dans le sol pour que je puisses me regarder ? J'en ai marre de voir ta tête tout les jours. Stupide, stupide, stupide. Se lamentait Fée, elle avait l'impression de redevenir un chaton idiot qui déblatérait des propos insensé.


« Bon.. Bref, oublie ce que j'ai dit, je dis des choses un peu bête parfois. Tentant de changer complétement de sujet, elle tenta ; Ton apprentissage se passe bien, tu as appris de nouvelles choses récemment ? »

Fée se rendit compte que c'était une autre question stupide étant donné que les apprenties faisait presque toujours leurs entraînements ensemble en compagnie de Nuage du Soleil, mais peut-être que depuis, Souvenir des Etoiles avait subitement appris une manière innovante de chasser les oiseaux, comme se créer des ailes à partir de végétaux pour pouvoir voler également ? Non mais à quoi elle s'attendait. La jeune apprentie tenta d'observer un point au loin, mettant de l'ordre dans ses idées, décidemment lorsqu'elle était en présence de Nuage de Lune, elle avait l'impression de perdre tout ses moyens.

I ain't got no brains in my heart.
Nuage de l'Éphémère & Nuage de Lune
Lune 1210


Alors que la pluie s'intensifiait, Nuage de Lune suivit Nuage de l’Éphémère jusque sous le couvert de quelques buissons épais. Il n’y avait pas énormément de place, aussi, elles durent se blottir l’une contre l’autre. L’apprentie ébène luttait toujours contre ses larmes, et elle évitait soigneusement de croiser le regard de son amie.

Elle laissa vagabonder ses pensées. Elle s’imaginait courant à ses côtés, sillonnant le territoire de la Lune de part en part. Tantôt chassant, tantôt patrouillant, elles avaient tant d’aventures à vivre, tant de choses à voir ! Lune ne savait pas ce qui la faisait trembler, le froid ou le chagrin qui l’accablait. Venait-elle de gâcher à jamais toute possibilité d’un avenir à deux ? Mais quelle idiote je fais ! Pourtant, elle avait répété les mots, elle y avait réfléchi à n’en plus dormir, elle s’était préparée ! Et lorsque le moment fatidique s’était présenté, elle avait tout gâché. Au final, ça ne l’étonnait même pas.

Soudain, la désagréable sensation d’être observée fixement lui picota la nuque. Elle tourna la tête et croisa le regard de Fée qui semblait perdue en pleine contemplation de son visage, un sourire béat creusant ses joues.

« Tes yeux ils sont... Incroyables Lune. J'ai l'impression d'y voir deux joyaux de cristal. Je.. Tu es si belle. »

Lune en eût le souffle coupé. Alors celle-là, elle ne s’y attendait pas. Son cœur accéléra soudainement. Ses pensées fusaient dans son esprit. Restait-il un espoir ? Le fol espoir de partager la vie de Fée ? D’être, peut-être pour le reste de ses jours, non pas simplemement son amie, mais sa compagne ? En venant la trouver ici, Lune s’attendait à ce que les sentiments de son amie soient réciproques. Elle n’était tout de même pas aveugle, tous ces sourires, toutes ces œillades, ces frôlements subtils et incertains, ces frissons partagés … Elle ne les avaient quand même pas inventés ?  Et, là, ce que Fée venait de lui dire … ce n’était pas juste dans sa tête, si ? Elle ne surinterprétait pas cette lueur amoureuse dans son regard ! Et pourtant Fée recula, enfouissant son museau dans ses pattes antérieures.

« Pardon.. J'ai... Heu, été super intrusive, je voulais pas être bizarre, mais c'est la vérité, j'aime beaucoup tes yeux, les miens sont plus ordinaire et puis j'ai plus souvent l'occasion d'admirer les tiens, que les miens aussi ahah… Bon.. Bref, oublie ce que j'ai dit, je dis des choses un peu bêtes parfois. Ton apprentissage se passe bien, tu as appris de nouvelles choses récemment ? »

Ce qui frappa Lune, c’est que sa camarade était en réalité dans le même état qu’elle, en proie à la plus grande des confusions. Et alors qu’elle regardait la calico aux traits délicats, toute notion de peur s’envola. Il n’y eût plus de doutes, plus d’hésitation. Ne restait que l’amour sincère qu’elle lui portait, ce même amour qu’elle savait réciproque.

« Fée … » L’apprentie couleur de jais s’interrompit, choisissant ses mots avec soin. « C’est moi qui t’ai dit des choses bêtes tout à l’heure. La vérité, c’est qu’en ta présence, j’ai l’impression de devenir stupide. Je fais n’importe quoi. »

Lune observa Fée un instant, se perdant dans l’ambre de ses grands yeux. Fais-le. Fais-le maintenant ou tu n’y arriveras jamais. Lentement, elle s’approcha. Et, avec douceur, elle pressa son museau contre celui de la calico. Elle savoura ce contact éléctrisant dont elle avait tant rêvé, avant de le rompre.

« Je t’aime. Je ne saurai pas trop l’expliquer, je ne sais pas d’où ça me vient, ni pourquoi. Mais je le sais, c’est tout. Je … Je veux être à tes côtés. J’ai besoin de toi. »

Les larmes qu’elle s’était efforcée de refouler finirent par couler, mais c’étaient de belles larmes, de joie, de soulagement. Elle avait surmonté son angoisse. Et même si elle appréhendait un peu la réaction de la belle apprentie, au moins, il n’y aurait aucun regret à avoir ; elle avait suivi le chemin qu’avait tracé son cœur.