M O O N L I G H T

ASPHODÈLE DES CHAMPS

Cette nuit-là, Asphodèle des Champs ne parvenait pas à trouver le sommeil. Elle tournait et tournait encore dans son nid au cœur de la tanière des guerriers, mais son esprit était rempli de pensées actives qui la tenaient éveillée. Doucement, elle se leva et enjamba les corps serrés des guerriers endormis. Elle se retourna avant de sortir. Son Clan dormait paisiblement, et cette pensée la remplit de douceur et d’affection. Tous ces chats comptaient tellement pour elle. Ils avaient placé leur confiance en elle en l’élisant maîtresse de la parole et son nouveau rôle lui tenait très à cœur.

Silencieusement, la féline tricolore sortit du Camp et s’élança à vive allure vers la lande. L’air était froid mais son pelage épais la protégeait. Le ciel était dégagé et laissait la lune éclairer les vallées, nimbant l’herbe verte de reflets argentés. Asphodèle des Champs ralentit l’allure une fois qu’elle était suffisamment éloignée du camp et se mit à marcher en contemplant le ciel et l’horizon. Elle poussa un petit soupir de soulagement. Parfois, cela faisait du bien de s’éloigner et de prendre le temps d’être seule. La féline tricolore était très sociale et son nouveau rôle l’amenait encore plus à être en permanence entourée des autres. Elle aimait cela et cette dynamique lui donnait encore plus de force. Cependant, elle avait peu le temps de souffler et les tensions entre les Clans pesaient lourd sur elle. Elle était encore jeune et laissait parfois ses émotions l’envahir. Elle était inquiète, et même si elle arrivait à le cacher de mieux en mieux, il n’en était pas moins que le soir ses pensées fusaient dans toutes les directions et elle se posait beaucoup de questions sur la meilleure marche à suivre pour le Clan. Mais cette nuit-là, elle s’accorderait un peu de répit. Une petite brise souffla, la tirant de ses pensées. Asphodèle secoua la tête, mais un parfum inconnu lui parvint et elle se dressa brusquement sur ses quatre pattes, à l’affût.

L’odeur n’était pas celle de l’un des cinq clans, il devait donc forcément appartenir à un solitaire. Que venait faire un solitaire en plein cœur des territoires claniques ? En temps normal, ces chats-là savaient qu’ils n’avaient pas intérêt à s’aventurer aussi loin … La guerrière scruta la lande et les quelques buissons parsemés ici et là. Au loin, un pelage clair se démarquait dans l’herbe sombre. Le chat en question ne semblait même pas chercher à se cacher. Sur la défensive et le pelage hérissé, Asphodèle des Champs bondit et s’approcha du félin en courant. Arrivé derrière lui, elle feula.

« Que fais-tu ici ?! Un solitaire ne devrait pas s’aventurer sur le territoire du Clan du Vent. »  

Asphodèle se tenait campée sur ses quatre pattes, le buste gonflé. Elle était plutôt grande mais le matou en face d’elle l’était aussi. Il était plutôt musclé pour un solitaire, mais la guerrière ne se sentait pas pour autant menacée. Elle était formée au combat et quoi qu’il arrive, elle ne doutait pas qu’elle pourrait prendre le dessus. A la fois méfiante et curieuse, elle toisait le chat beige du regard et attendait sa réponse.