Il paraît qu'on apprend toute sa vie [PV Dent de Sabre - Nuage des Banquises]

~ Il paraît qu'on apprend toute sa vie ~

Dent de Sabre / Nuage des Banquises / Griffe d’Ebène

Juste avant les premières lueurs du matin, Griffe d’Ebène se faufila hors de la Tanière des Guerriers sans réveiller les autres. Elle s’étira en douceur au milieu du camp, tout était très calme. Elle aimait se lever avant les autres, cela lui évitait de se retrouver au milieu du trafic des premières heures de la journée. Jamais très à l’aise dans ces situations, elle avait pris cette habitude à Cerfblanc et l’avait gardé malgré le nombre bien réduits de chats à Valeemar.

Ce jour-là, elle avait décidé de partir chasser. Cela faisait plusieurs jours qu’elle patrouillait du matin au soir et les frontières restaient tranquilles. Les Escadrons étaient certes centrés sur la surveillance des limites du territoire, mais ils devaient bien aider pour le reste des tâches, les effectifs étaient tous réduits. D’autant qu’elle se sentait mal à prendre dans la réserve de nourriture sans jamais rien y mettre. Alors de temps en temps, elle prenait une matinée ou une journée pour chasser, ce qui lui permettait aussi de se vider l’esprit.

Elle attaqua sa toilette, l’air était frais et la rosée coulait doucement sur les feuilles et les herbes. Il n’avait pas plu la veille ni pendant la nuit, et le ciel semblait dégagé. Il serait facile de trouver une proie dans ces conditions.
Griffe d’Ebène était plus douée pour chasser en groupe, préférant créer une tenaille à leur proie plutôt que de miser sur ses talents moyens en pistage. Malgré cela, son manque de sociabilité la poussait souvent à rester seule. Depuis leur arrivée à Valeemar, elle se disait qu’il faudrait qu’elle fasse des efforts pour aller vers les autres adultes, ayant compris pendant le Voyage qu’ils n’étaient pas tous enfermés dans les conflits des clans. La paix récente tendait à lui donner raison et de son côté, elle tâchait de garder espoir pour une paix vraiment durable.

Partant de ce principe, elle regarda aux alentours, et se dit qu’elle interpellerait le premier guerrier qu’elle verrait pour lui proposer de venir avec elle. Repérant un mouvement à l’entrée de la tanière des Guerriers, elle inspira à fond et s’approcha. Elle vit sortir un grand félin sombre, très massif à côté d’elle. C’était Dent de Sabre, elle le connaissait de vue, il semblait proche des petits, visitant souvent la pouponnière. Cela la rassura un peu, elle n’avait rien contre lui, il devait être aussi discret qu’elle et n’avait pas mauvaise réputation. Elle devrait s’en sortir.

Ebène s’arrêta à quelques pas du guerrier, le laissant se réveiller tranquillement. Elle se rendit compte que ce devait être gênant d’être observé en silence, il n’y avait personne d’autres dans le camp, impossible de rater la féline assise en face de lui. Elle se lança donc.

« Bonjour. Je vais partir chasser, si ça t’intéresse je peux t’attendre à l’entrée du camp pendant que tu te prépares. Sinon, ce n’est pas grave. »

Aucune finesse. Griffe d’Ebène se maudit silencieusement, persuadée qu’il allait plutôt chercher à la fuir. Rougissant de honte sous son pelage, elle s’éloigna en évitant son regard, la tête basse et en se retenant de courir. La journée commençait bien.

Ouvrant à demi ses yeux ambrés, Sabre constata avec une légère surprise que le matin était déjà là. Quelques nuits auparavant, il avait fait nuit blanche, hanté par des souvenirs qui semblaient appartenir à un autre monde. Il avait donc quitté le camp, souhaitant se recueillir à sa manière en lieu plus paisible. Parvenu à l'endroit habituel, il s'était rendu compte qu'Ardeur des Nuages l'avait suivi, les deux félins avaient donc conversé un moment sous les rayons argentés de la lune. Au final, le guerrier n'avait pas vraiment eu le temps d'apaiser les pensées troublantes qui tournaient dans son esprit, mais la présence de la jeune apprentie l'avait aidé à se changer les idées.

Se redressant, il étira ses grosses pattes, fit le dos rond, et creusa les reins pour réveiller ses muscles. Il devait être encore tôt : la tanière des guerriers était remplie. Dardant un instant sa couche de mousse de ses griffes, Dent de Sabre entama une toilette rapide. Son poil, long et épais, lui donnait du fil à retordre. De cette manière, il préférait effectuer plusieurs petites toilettes qu'une complète. Fin prêt, il se posta un instant à la sortie du dortoir, humant l'air frais de ce début de journée. Baillant à s'en décrocher les crocs, il réalisa ensuite d'une femelle de l'escadron s'était dirigée vers lui. Pensif, ses oreilles pipèrent. Griffe d'Ébène. Une chatte aussi discrète que lui, qu'il connaissait peu bien qu'il se sentait assez familier pour une simple raison : Elle avait connu Cerfblanc, elle aussi.

Visiblement prête à attaquer cette nouvelle journée, elle exposa le motif qui l'avait fait venir à sa rencontre. Suite à quoi, la guerrière grise trottina jusqu'à la sortie du camp. Les yeux du matou se plissèrent, légèrement amusé. Avec le tact dont elle venait de faire preuve, il avait la confirmation qu'ils partageait un attrait certain pour la solitude. La partie de chasse mentionnée fit hésiter le vétéran. Il n'était pas le meilleur à la chasse, bien qu'avec l'âge et l'expérience, il ait sû combler ses défauts. Enfin, il ne pouvait pas refuser un peu de compagnie pour une fois que l'occasion se présentait, pas vrai ? Rejoignant rapidement la chasseuse, il s'arrêta à sa hauteur effleurant son épaule du bout de la queue en signe de bienveillance.

« Bien matinale aujourd'hui, Griffe d'Ébène. Vague des Mers m'a parlé d'une recrudescence de campagnols dans les marécages, on va voir ? » Attendant une réponse de la femelle, ou une autre proposition de terrain de chasse, il inclina la tête pour signifier qu'il était prêt, et les deux félins s'élancèrent à une allure tranquille, permettant de discuter sans finir essoufflé. Fouillant sa mémoire durant la course, il fût étonné de constater qu'il en savait moins sur Griffe d'Ébène que sur des guerriers plus jeunes, voir des apprentis. Pourtant, les deux avaient bonne réputation, et avaient partagé bien des batailles et évènements des 4 clans, devenus 5 aujourd'hui. « Les frontières sont elles tranquilles en ce moment ? J'ai l'impression que nous ne sommes plus habitués aux périodes de calme... Malheureusement. » A peine avait-il miaulé ces mots qu'un fumet vint lui chatouiller le museau. La chatte avait dû le sentir aussi, puisqu'ils s'arrêtèrent quasiment au même moment. Un félin de l'Ombre, mais visiblement jeune...

HRP:

Griffe d’Ébène s'éloignait en se réprimandant intérieurement d'être si peu douée avec ses semblables. Elle avait pensé qu'après le Voyage, où ils s'étaient tous un peu rapprochés, et maintenant qu'elle était décidée à faire des efforts, ce serait plus facile. Mais non. Des dizaines de lunes à s'enfoncer dans ses mauvaises habitudes, il lui faudrait bien plus qu'un peu de bonne volonté un matin sur deux.

Elle fut donc surprise et faillit sursauter quand il arriva près d'elle, lui effleurant l'épaule. Reprenant contenance, elle répondit, dissimulant au mieux son étonnement et sa joie devant cette petite victoire.
"Oui, je me lève souvent avant tout le monde. Va pour les marécages."

Ils s'élancèrent à petites foulées, et elle commença à se détendre, le matou ne semblait pas se formaliser de ses manières. Ils restèrent silencieux un moment, Ébène ne savait pas de quoi parler alors elle se concentra sur les stratégies de chasse qu'ils pourraient mettre en place dans les marécages.

La question de son compagnon la sortit de ses pensées. C'est vrai que l'Escadron était au premier rang des frontières. Elle se rendit compte que les autres chats du clan n'étaient pas forcément au courant de l'activité des frontières, puisqu'ils ne patrouillaient presque jamais. Elle devrait sûrement communiquer un peu plus avec ses semblables.

Ils s'arrêtèrent en même temps, interpellé par une odeur familière. Un jeune félin de l'Ombre semblait se balader seul en dehors du camp. Ce qui n'était ni prudent ni permis. Heureusement, ils n'étaient pas trop loin dans les terres, le petit ne craignait rien par rapport aux autres clans, et elle ne sentait pas d'animal dangereux dans les parages. Elle regarda Dent de Sabre, et lui fit signe de reprendre leur petite course comme si de rien n'était.

"Très tranquilles. J'ai l'impression que c'est la première fois de ma vie que je vois une telle période de paix. C'est triste pour le passé, mais heureux pour la nouvelle génération. Une seconde chance pour nous tous."

Suffisamment éloignés, elle fit signe au chat noir de se mettre en position de chasse. Chuchotant, elle lui exposa son plan élaborée à l'origine pour des campagnols.

"Je pense qu'il faudrait le prendre en tenaille. Chacun de nous se rapproche silencieusement de lui par un côté jusqu'à lui tomber dessus en même temps. En restant sous le vent on devrait passer inaperçus jusqu'au dernier moment, mais s'il nous sent et s'enfuit on le rabat l'un vers l'autre. Qu'est-ce que tu dirais de lui donner une petite leçon? Une bonne frayeur devrait le rappeler à l'ordre non?"

Loin d'elle l'idée de traumatiser un jeune chat, elle s'inquiétait bien trop pour eux. Au contraire, elle voulait lui faire prendre conscience des réalités. Seul dans la forêt, n'importe quel danger pouvait surgir sur lui et il ne pourrait rien y faire. Elle savait très bien que la plupart des chatons ne se sentaient pas concernés par un beau discours.

Semblant d'accords, elle partit sur la gauche en rasant le sol à pas rapides. Elle sentait la présence du mâle sur sa droite, invisibles aux yeux d'un chat inexpérimenté. Elle fut ravie de le voir à l'oeuvre, plus vieux qu'elle, il semblait vraiment à l'aise.
S'écartant davantage, elle se rapprocha de plus en plus du jeune chat, qu'elle ne voyait pas derrière les fourrés. Attendant une seconde, elle se dit que le guerrier devait être en place lui aussi, et elle bondit.

Hors RP:

Contre toute attente, c'est visiblement une matinée en compagnie de Griffe d'Ébène qui s'annonçait pour le matou. A vrai dire, et malgré son penchant pour la solitude, une sortie accompagné le tentait bien, aujourd'hui. Qui plus est, il ne s'agissait pas d'une énième expédition de chasse qui lui aurait valu d'être flanqué de plusieurs félins, et de les voir ramener plus de proies que lui. Bien que très discrète et au final peu connue du félin, Griffe d'Ébène avait bonne réputation, dans le sens ou on entendait jamais du mal d'elle. Quelques commentaires positifs lui revinrent en mémoire, et qui plus est, elle venait de Cerfblanc, elle aussi. La belle époque... Quoi qu'il en soit, les deux bêtes s'étaient élancées en direction des marécages bien déterminées à agrémenter le tas de gibier du camp de leurs prises respectives.

Au cours de leur cavalcade, Dent de Sabre avait évoqué le sujet des frontières et leur éventuelle fréquentation par des guerriers d'autres clans. Pour l'heure, rien ne semblait vouloir perturber l'équilibre précaire des clans, mais Sabre comme Griffe d'Ébène devait savoir que la paix était loin d'être durable. Aussi, le calme actuel encourageait davantage à la méfiance qu'à l'insouciance. Pourtant, le vétéran acquiesça aux dires de son interlocutrice. Bon signe pour les jeunes... Disons que ça leur permettait de se focaliser pleinement sur leur formation. Sabre, pour sa part, craignait qu'ils ne soient que trop démunis en cas d'échauffourrés... Mais enfin, il ne souhaitait jouer les oiseaux de mauvais augures. L'apparition d'une odeur de jeune chat appartenant au clan permit au duo de changer de sujet.

Quand la femelle exposa son plan, très adapté a vrai dire, il se contenta d'hocher la tête à nouveau. C'est de cette manière que les deux guerriers se séparèrent, souhaitant tendre un "gentil" piège à l'inconscient qui avait réussi à s'extirper du camp. Tapis dans la végétation, le mâle progressait en direction de l'innocente cible à mesure que son acolyte en faisait de même. Un bruit sourd suivis de petits coups de patte sigifièrent que le jeune ombreux, affrayé, avait dû s'enfuir à toutes pattes. En direction de Sabre, malheureusement. Pressentant un choc contre ses propres pattes,  le chasseur ne bougea pas d'un iota, se contentant d'arguer le félin. S'adressant à la fière membre de l'escadron, il railla « Et bien... Les campagnols sont drôlement gros cette saison. T'en penses quoi Griffe d'Ébène, on le ramène au camp ou on le savoure sur place ? » Se léchant les babines, Sabre haussa un sourcil circonspect en avisant l'aventurier.

HRP:

Quand il vit le chaton débarouler comme un perdu à sa rencontre, le vétéran s'était tenu prêt à le recevoir. En apercevant sa bouille encore ronde afficher une expression entre la surprise et la frustration, il manqua d'éclater de rire. Visiblement vexé de s'être fait surprendre hors du camp, le jeunot ne manqua cependant pas d'aplomb pour répondre à ses aînés. Patiente, Griffe d'Ébène adopta une posture bienveillante et entreprit d'expliquer la raison de leur petit piège. Quand elle eut terminé, il acquiesça d'un signe de tête. La guerrière tigrée avait parfaitement raison. Même si le matou blanc comme neige n'avait pas franchit les frontières du clan, il s'était exposé à de nombreux dangers. Ces intentions restaient louables : il avait l'air prêt à en découdre avec sa formation d'apprenti. Ses petits yeux brillants en témoignaient. Remarquant l'air soudainement plus sombre de la femelle, il plissa les yeux avant de lancer :

« Griffe d'Ébène à raison. En te faisant dévorer par un blaireau, tu n'aurais pas l'occasion de nous montrer à quel point tu seras utile pour la survie du clan. » Sur un ton plus doux, il ajouta « Patience, jeune chat, ton baptême ne devrait plus tarder à présent. »

Bien sûr, Sabre se souvenait à quel point il avait hâte de faire ses preuves lui aussi, il y a bien des lunes. D'autant plus lorsqu'il s'était retrouvé dernier chaton vivant de sa portée, ses frères et soeurs ayant étés enlevés... Quoi qu'il en soit, la patience restait une qualité qu'il fallait acquérir au fil du temps. Que ce soit pour débusquer des proies, ou former de futurs guerriers. Observant les réactions du petit matou à "l'instant morale" du jour, c'est la proposition de Griffe d'Ébène qui acheva de dessiner un sourire sur son museau. Pas les meilleurs chasseurs... Ça c'est sûr. Néanmoins, la femelle faisant partie de l'escadron avait eu une excellente idée, que le chasseur salua d'un mouvement de queue impatient. Là ou des éléments plus formels auraient décidé de raccompagner le fuyard illico à la pouponnière, les deux félins semblaient partager le même point de vue.

« Absolument ! Je suis certain qu'Étoile de Jais ne nous tiendra pas rigueur de t'initier aux bases des responsabilités d'un chat de clan ! » Humant l'air, Dent de Sabre proposa « Sensibiliser ton museau aux odeurs qui feront partie de ton quotidien me semble un bon début. Tu as déjà dû en faire l'expérience depuis ta sortie de la pouponnière : elles sont très nombreuses, et tu dois savoir si elles correspondent à du gibier, un danger, un intrus, ou un simple habitant de la forêt. Prêt ?»

Attendant l'accord du petit matou au pelage neigeux, il s'étira avant de laisser Griffe d'Ébène choisir leur direction. Après tout, en tant qu'experte des patrouilles, elle était tout aussi apte que lui, si ce n'est plus au vu de son grade spécial, à prendre la tête de leur petite troupe originale. « Renifles autant que tu peux ! Poses nous des questions si tu le souhaite, et de notre côté, on cherchera à te faire discerner les fumets qui nous semblent importants.» A dire vrai, cette expédition revêtait une tournure imprévue qui réjouissait le mâle au poil sombre. De ce qu'il en savait et avait pu entendre et voir occasionnellement, Ébène était sensible et attentive envers les plus jeunes. Son expérience et ses connaissances compléteraient parfaitement les siennes pour une première leçon non officielle.